Transgrancanaria : c’est parti pour le premier événement international de trail en 2021!

Magda Laczak
La Polonaise Magda Laczak devant le Roque Nublo - Photo : Transgrancanaria

La 22e édition de la Transgrancanaria, l’un des événements de trail running les plus populaires de la planète, a bien lieu ce week-end sur l’île volcanique espagnole de Gran Canaria, au large de l’Afrique du Nord-Ouest. Les organisateurs ont en effet obtenu mi-février l’autorisation des autorités gouvernementales, malgré le contexte sanitaire. Toutes les courses au programme devraient se dérouler presque normalement, mais les spectateurs ainsi que l’assistance personnelle des coureurs sont interdits. La course la plus en vue, la « Classic », un ultra-trail qui traverse l’île du nord au sud sur 130 km et 6700 m de D+ s’élancera ce vendredi 26 février. Et cela promet une grosse bagarre entre les coureurs internationaux qui ont fait le déplacement. Distances+ fait le point dans cet article sur les forces en présence.

Course inaugurale du Spartan Trail World Championship

mathieu blanchard
Sur le parcours de la Transgrancanaria avec vue sur le Roque Nublo – Photo : David Delfour

La Transgrancanaria, qui ne fait plus partie désormais du circuit Ultra-Trail World Tour (UTWT), inaugure en cette année 2021 la première édition du nouveau circuit international Spartan Trail World Championship (STWC), au calendrier duquel on trouve notamment la Patagonia Run et le Lavaredo Ultra Trail, qui étaient auparavant des courses de l’UTWT. À noter que le STWC octroie des primes d’argent aux vainqueurs de chaque épreuve.

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Pau Capell, le grand absent

pablo villa pau capell
Pablo Villa et Pau Capell au fil d’arrivée de la Transgrancanaria 2020 – Photo : Vincent Champagne

Une chose est sûre : Pau Capell ne remportera pas une cinquième victoire successive sur l’épreuve Classic de la Transgrancanaria, car la vedette espagnole a déclaré forfait en raison d’une blessure de dernière minute. Celui qui enchaîne les ultras — et bien souvent les victoires — à un rythme effréné depuis 2013, a expliqué qu’il s’était entraîné dur et avec acharnement, suivant son plan de préparation à la lettre, mais qu’une lésion musculaire était apparue lors de son ultime entraînement spécifique.

La course phare de la Transgrancanaria, qui s’élance traditionnellement le vendredi soir à 23 h (minuit à Paris, 18 h à Montréal) sur la plage de Las Palmas, aura donc le mérite d’être exceptionnellement ouverte cette année chez les hommes, avec une vingtaine de coureurs susceptibles de monter sur le podium sur un peu plus de 400 partants. Du côté des femmes, il faut s’attendre à une lutte d’expertes de haut vol. 

Une victoire de Pablo Villa en solo?

pablo villa
Pablo Villa – Photo : Vincent Champagne

L’Espagnol Pablo Villa s’élancera avec l’étiquette de grand favori, puisqu’il a remporté l’épreuve de 130 km l’année dernière, en 13 h 04 min, main dans la main avec Pau Capell, après avoir terminé deuxième en 2019, en 13 h 31 min et après une victoire en 2018 sur le format « Advanced » de 65 km. Il est aussi champion en titre de la TDS (145 km, 9130 m D+) à l’Ultra-Trail du Mont-Blanc. Reste qu’il devra se ravitailler sans l’aide habituelle et bien rodée de son assistance, ce qui peut entraîner une perte de temps non négligeable, mais surtout faire une différence mentalement.

Les autres chances espagnoles

Jordi Gamito
L’Espagnol Jordi Gamito laisse exploser sa joie de terminer l’UTMB à la 3e place – Photo : Pascal Tournaire / UTMB

D’autres coureurs espagnols peuvent légitimement prétendre au trône, à l’image de Jordi Gamito, qui participe à sa cinquième Transgrancanaria et connaît bien les sentiers techniques de l’île et ses conditions climatiques (froid la nuit, surtout en montagne, et potentiellement très chaud le jour). Il a terminé quatrième de la Classic en 2017 (13 h 53) et deuxième de l’Advanced en 2020. Il a aussi gagné un trail de 72 km à la Sky Gran Canaria en 2019. 

Pere Aurell, qui a remporté en 2018 la Transvulcania (73 km, 4300 m D+) sur l’île voisine de La Palma sera aussi à surveiller, même s’il est plutôt un spécialiste des moyennes distances. D’ailleurs, la dernière fois qu’il a couru sur un ultra comparable avec une adversité de haut niveau — c’était l’été dernier à l’Ultra-Trail Côte d’Azur Mercantour (134 km, 8500 m D+) —, il s’était classé seulement 11e à 4 h 30 du vainqueur (Germain Grangier). Et il avait abandonné à la TDS.

Et si — pour en finir avec les meilleures chances « locales » —, la surprise de cette édition était Alejandro Major? Ce sera son premier ultra de plus de 100 km — en fait, ce sera même son premier trail de plus de 65 km —, mais le jeune homme de 28 ans sera comme à la maison sur les sentiers de la Grande Canarie, lui qui a remporté le parcours Advanced l’an dernier, dans la foulée de son marathon-trail sur l’île voisine de Lanzarote.

Les Français à la chasse

mathieu blanchard
Mathieu Blanchard en reconnaissance sur le parcours de la Transgrancanaria – Photo : David Delfour

Un peu plus de 120 coureurs seraient parvenus à quitter l’Hexagone pour les îles Canaries selon les listes d’inscrits aux différentes courses. Parmi eux, trois champions peuvent viser une place sur le podium.

À commencer par Aurélien Dunand-Pallaz, champion de France de trail longue distance 2018, deuxième la même année du MIUT, l’Ultra-Trail de l’île de Madère (115 km, 7300 m D+), et détenteur, depuis septembre dernier, du record du monde de dénivelé en 24 heures (17 217 m). Adepte du ski-alpinisme, il a écourté sa saison pour ce premier grand objectif de l’année.

« Je me sens plutôt bien, même si c’est nouveau pour moi de préparer un ultra au mois de février », a-t-il confié à Distances+, en précisant que la transition avec son entraînement en ski-alpinisme s’était bien passée. « J’espère être de la bataille pour le podium à l’arrivée », a prévenu Aurélien quelques jours avant le départ. Il veut se glisser dans le groupe qui prendra les devants ce soir.

Le Franco-Montréalais Mathieu Blanchard sera aussi au départ avec l’ambition de lancer en beauté une saison qui doit l’emmener à l’UTMB et au Grand Raid de La Réunion. Il aura attendu pile un an avant d’accrocher un nouveau dossard. Il était resté sur une deuxième place au Tarawera Ultramarathon en Nouvelle-Zélande et une victoire facile, presque en dilettante, au 83 km de l’Ultra-Trace de Guadeloupe, avant d’enchaîner les défis au Québec, notamment ce FKT sur la traversée de la Gaspésie via le GR-A1 (650 km et 25 350 m D+ en 7 jours). Il avait ensuite rejoint la France pour le début de la diffusion de l’émission Koh-Lanta à laquelle il avait participé fin 2019 et il y est resté depuis en raison entre autres des restrictions sanitaires.

Mathieu a lancé tardivement sa préparation à la Transgrancanaria. Il ne s’est entraîné sérieusement que durant un mois avant l’événement. « C’est peut-être un peu cours, mais bon je commence à avoir un bon bagage d’expérience pour m’en sortir », estime-t-il, confiant. L’an dernier, il avait fait la même prépa « accélérée » avant Tarawera. « C’était exactement la même configuration et ça avait bien fonctionné, alors pourquoi pas une deuxième fois », se demande-t-il, joueur.

S’il affirme se sentir en forme, ne ressentir aucune douleur et avoir eu de bonnes sensations au cours des deux dernières semaines, il a pris conscience, après avoir reconnu le parcours, qu’il devra s’employer pour réussir une grande course. « Je ne m’attendais pas à quelque chose d’aussi difficile, c’est du costaud cette course », affirme-t-il.

Mathieu Blanchard appréhende tout particulièrement la dernière partie de ce 130 km, à partir de Garañon, un marathon essentiellement descendant. « C’est très cassant et très chaud, fait-il remarquer. Si tu n’en as pas gardé sous le pied, je pense que tu peux passer un moment difficile ici. »

Enfin, il faudra sans doute compter sur l’expérimenté Julien Chorier, toujours capable de briller sur un ultra, lui qui a remporté deux fois la Diagonale des fous, le MIUT ou encore la Hardrock au cours de son immense carrière. La dernière fois qu’il a pris le départ de la Transgrancanaria, c’était en 2019, et il avait fini à une belle quatrième place, après 14 h 11 min de course.

Les traileurs de l’Europe du Nord en embuscade

Aurélien Dunand-Pallaz
Aurélien Dunand-Pallaz lors d’une de ses sorties de reconnaissance à Gran Canaria – Photo : Racephotos Sport Photography / Compressport

Parmi les autres favoris de la Classic, il y a deux Suédois, Simen Hjalmar Wastlund, vainqueur chez lui du 100 km du Fjällmaraton (une course du Spartant Trail World Championship) en 2020 et Carl Johan Soerman, qui a remporté il y a moins d’un mois la Ronda Ghibellina Trail (71 km, 3700 m D+) en Italie. Il avait abandonné l’an dernier à la Transgrancanaria.

Le Léton Andris Ronimoiss, qui compte entre autres comme faits d’armes une victoire au MIUT et une deuxième place à l’Eiger Ultra-Trail en Suisse et à la Mozart 100 en Autriche, fêtera lui son cinquième départ sur cette course qui, pour le moment, ne lui réussit pas vraiment. Il a abandonné deux fois et n’a pas fait mieux qu’une 11e place, en 2017.

Le Lituanien Gediminas Grinius saura-t-il faire parler l’expérience, lui qui a remporté la Transgrancanaria en 2015 et signé une deuxième place l’année suivante devant… Pau Capell? En tout cas, l’ancien militaire âgé de 42 ans continue de courir énormément sans jamais s’éloigner du haut niveau.

Attention aussi à l’Italien Daniel Jung, quatrième à l’arrivée à Maspalomas en 2018, qui court seulement un ultra de temps en temps, mais en étant généralement performant.

Une lutte à quatre chez les filles?

magdalena laczac
Magda Laczak, double tenante du titre de la Transgrancanaria – Photo : Transgrancanaria

L’Américaine Kaytlyn Gerbin n’étant pas à Gran Canaria pour défendre son titre, il faut s’attendre à voir deux habituées aux avant-postes, la Polonaise Magdalena Laczac, qui a remporté la Transgrancanaria en 2018 et 2019, et l’Espagnole Azara Garcia, victorieuse en 2017 et troisième en 2020 en améliorant son temps de près d’une heure. Le meilleur chrono des deux athlètes est très proche sur cette course (entre 15 h 18 pour Magdalena, 15 h 31 pour Azara).

Mais elles devront faire face à Ragna Debats, qui a déjà remporté une course aux îles Canaries, la Transvulcania en 2019. La Néerlandaise, championne du monde de trail en 2018, a entre autres remporté le Marathon des Sables et la CCC en 2019 et le 111 km du Montreux Trail Festival l’an dernier.

On suivra aussi, dans cette lutte pour une place sur le podium, la traileuse française Lucie Jamsin, qui n’a pas une grande expérience des ultras, mais qui est très motivée et qui veut continuer d’exploiter son potentiel sur ces longues distances, elle qui a gagné l’an dernier la seule course à laquelle elle a participé, l’Ultra 01 (167 km et 7200 m de D+) dans l’Ain. À noter qu’en 2018, elle avait terminé deuxième du Maratón de la Transgrancanaria (42 km, 840 m D+, 2500 m D-), qui correspond aux 42 derniers kilomètres de la Classic.

« Je me sens plutôt bien, a dit Lucie Jamsin à Distances+. La préparation hivernale a été un peu compliquée à cause des conditions météo dans les Alpes, mais je suis descendue m’entraîner dans le sud de la France pour échapper à la neige. Ce sera une première pour moi de courir une si longue course en hiver. Et une première aussi de boucler autant de dénivelé. »

Lucie veut « rester prudente » et tenter de se rapprocher des 17 h 30 de course. « Ce sera une belle aventure et une très grosse expérience à prendre étant donné qu’il n’y aura pas d’assistance. Je vais devoir me gérer seule, et ça, ce sera riche d’enseignement », s’enthousiasme-t-elle.

Plusieurs autres coureuses de très bon niveau ont des chances de tirer leur épingle du jeu en fonction des aléas de la compétition, comme par exemple la Suissesse de 48 ans Denise Zimmerman, qui peut compter sur une expérience colossale, elle qui compte 93 courses en carrière selon l’ITRA, dont 27 victoires et 52 top 3. Elle était d’ailleurs montée sur le podium de la Transgrancanaria, mais c’était il y a près d’une décennie.

Victoire de Marco Gubert sur la 360

Marco Gubert
L’Italien Marco Gubert a remporté l’édition 2021 de la WAA 360 sur l’île de Gran Canaria – Photo : Carlos Diaz-Recio

L’Italien Marco Gubert a remporté vendredi 26 février la Transgrancanaria 360, la très grande distance de l’événement à travers Gran Canaria (262 km, 11 000 m D+), avec même cette année un prologue de 30 km sur l’île de Tenerife. Il a passé la ligne d’arrivée après 46 h 28 de course, devançant l’Espagnol Ivan Galvan Siverio de plus de 2 heures.

Le coureur franco-italien Luca Papi est quant à lui arrivé troisième ex-aequo avec l’Espagnol Roselló Solé Eugeni, avec qui il a partagé une longue partie des sentiers, après 54 h 26 min de course, soit 8 heures après le vainqueur. Il devait prendre le départ du 130 km en soirée, à Las Palmas, le temps de se rendre à l’autre extrémité de l’île, mais il a passé la ligne d’arrivée trop tard pour pouvoir se reposer un peu et atteindre cet objectif, d’autant qu’il a plusieurs petits soucis logistiques, comme son sac à dos qui s’est déchiré et l’un de ses bâtons qui s’est brisé.

Luca avait réalisé l’exploit d’enchaîner les deux courses lors de cette édition 2019 de la Transgrancanaria, parcourant, en arrondissant, 400 km et plus de 20 000 m de D+ en moins de 78 h.

La Trans 360 a été remportée chez les femmes par la Française Claire Bannwarth en 63 h 42. Au moment d’écrire ses lignes, dans la nuit de vendredi à samedi, elle était la seule à avoir passé la ligne d’arrivée.



 

 

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