Les montres GPS ainsi que nos charmants réseaux sociaux (Strava, Facebook et autres) ont la fâcheuse manie de nous pousser à augmenter notre volume d’entraînement plutôt que sa qualité et sa spécificité. Quoique très utiles, ces outils peuvent rapidement devenir l’ennemi numéro un du coureur.
Plusieurs théories circulent sur la manière de bien s’entraîner pour atteindre ses objectifs en course en sentier. Toutefois, le secret du succès se trouve probablement caché quelque part entre l’entraînement spécifique structuré et la liberté de courir pour le plaisir. Comment s’y retrouver? Voici les conseils les plus à jour dans le domaine de la course.
L’entraînement par intervalles : une stratégie incontournable
L’entraînement par intervalles (EPI) invite à maximiser la quantité de temps couru à haute intensité, là où c’est « payant ». Ce type d’entraînement mise sur la répétition de séquences en intensité élevée. L’idée est de fractionner la sortie en bouchées d’efforts « difficiles » et d’ainsi cumuler finalement beaucoup plus de temps d’entraînement à intensité élevée que ce qui serait tolérable lors d’un effort continu à haute vitesse (tempo run).
Les études font consensus : l’EPI est la meilleure stratégie d’entraînement pour gagner efficacement en endurance (capacité de maintenir un effort intense pour une longue durée), en VO2 max (consommation maximale d’oxygène), en puissance et en vitesse.
Il existe plusieurs sous-types d’EPI et de nombreux guides d’entraînement pour nous aider à les intégrer. Il est toutefois impératif d’introduire très progressivement les intervalles dans son programme afin d’éviter les risques associés à des changements de biomécanique trop brusques.
Courir longtemps et souvent : que penser des long slow runs?
Certains ultramarathoniens de renom, comme Geoff Roes (gagnant de la Western States 100 2010), sont d’ardents défenseurs d’un type d’entraînement continu connu sous le nom de long slow runs. Ils peuvent courir plus de 180 km par semaine sur une base régulière. Geoff Roes soutient qu’un ultramarathon en sentier se gagne davantage par la patience, l’alimentation et la détermination que par la vitesse. Pour justifier son point, il souligne que le meilleur temps d’Anton Krupicka (deux fois vainqueur du Leadville 100) sur cinq kilomètres est de 16 minutes 30 secondes. On comprend que les intervalles de vitesse ne doivent pas être au centre de son plan d’entraînement.
Les études nous démontrent pourtant que l’entraînement continu à basse intensité qui mise sur un volume d’entraînement élevé a le désavantage d’exposer le coureur à un risque de blessures de surcharge et n’offre pas un rapport de gain intéressant en fonction de l’énergie et du temps investis. Se fier aux performances des coureurs élites pour émettre des recommandations aux coureurs récréatifs est un exercice périlleux. Ces champions se trouvent habituellement dans une classe à part et possèdent un bagage génétique avantageux qui n’est pas offert à tous.
Cela étant dit, les long slow runs ne sont certainement pas à éliminer. Elles permettent de tester les acquis et de se donner confiance. Il ne faut simplement pas en abuser.
Suivre son instinct selon l’entraînement de type fartlek
Quelque part entre les entraînements par intervalles très structurés et les long slow runs, l’entraînement de type fartlek est toujours aussi populaire.
Par définition, il n’est pas structuré et son intensité varie donc selon l’envie du moment. Le plaisir est forcément au rendez-vous, mais les bénéfices seront directement proportionnels au temps passé à intensité élevée. Notons qu’il est parfois tentant (et risqué) de passer trop de temps (ou pas assez) à forte intensité, ou de mal répartir les périodes exigeantes lors d’un entraînement de fartlek.
Approfondir ses connaissances
Pour en apprendre davantage sur les différents types d’entraînements et la physiologie de l’exercice, il peut être pertinent de se tourner vers les ouvrages d’auteurs qui se sont spécialement attardés à étudier ces questions.
Parmi mes lectures coup de cœur des dernières années, Training Essentials For Ultrarunning, de Jason Koops, fraîchement sorti cette année, fait beaucoup parler. Les excellents livres de Guy Thibault, Entraînement cardio : sports d’endurance et performance et En pleine forme, demeurent également des incontournables pour l’athlète qui cherche à s’entraîner sérieusement.
Un concept primordial ressort parmi tous ces ouvrages : il faut s’entraîner plus intelligemment et non pas en plus grande quantité. Nous devons garder en tête que la clef du succès en course en sentier passe par la spécificité, c’est-à-dire des entraînements orientés vers des objectifs précis.
Développer ses aptitudes de façon spécifique
En plus de l’entraînement par intervalles qui, comme nous l’avons vu, est déterminant pour les gains en vitesse, en puissance, en VO2 max et en endurance, il existe également quelques trucs incontournables pour améliorer ses performances en course en sentier. En voici quelques-uns :
- Apprendre à se laisser descendre dans les côtes sans freiner et sans forcer;
- Développer ses aptitudes à courir dans la roche, les racines, la neige et la boue de façon naturelle et intuitive sans trop réfléchir. Le gain en agilité permet d’éviter de dépenser un surplus d’énergie précieuse à enjamber les obstacles de façon inefficace;
- Développer la relance, qui est cette aptitude à varier efficacement les types d’efforts en montagne selon les reliefs;
- Développer la puissance en grimpe. Les intervalles de grimpe sont d’ailleurs très « payants » à ce niveau;
- Apprendre à écouter ses sensations et à adapter ses stratégies de course;
- Maximiser son entraînement intestinal et connaître ses particularités nutritionnelles personnelles;
- Maximiser sa technique de course pour rendre sa foulée plus efficace.
Des professionnels à notre disposition
Finalement, courir intelligemment, c’est aussi aller chercher de l’aide et des conseils de la part de gens expérimentés. Consulter un entraîneur afin de planifier ses objectifs personnels et son calendrier annuel est une stratégie grandement sous-utilisée par la communauté de coureurs en sentier.
Pourtant, nombreux sont les entraîneurs compétents qui sont à notre disposition. Les bénéfices d’une assistance dans la planification des phases de progression, d’affûtage et de repos de notre plan annuel ne font aucun doute. Que l’on soit de niveau purement récréatif ou élite, les effets seront perceptibles tant en matière de gains de performance que de prévention des blessures.
Bref, maximiser ses forces et améliorer ses points faibles tout en restant souriant, passionné, inspiré et motivé, c’est bonifier son plaisir et son bonheur. Voilà ce que c’est d’avoir une « attitude de champion »!
Simon Benoit est médecin de soins critiques en urgence, en plus de tenir une pratique de bureau axée sur la médecine sportive. Il est membre de l’Association québécoise des médecins du sport. Il est également diplômé en physiothérapie et en chiropratique et est ambassadeur de La Clinique du Coureur. Lisez tous ses articles!
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