Note de la rédaction : cet article a été publié avant le départ d’Erik Clavery. Le Français, qui a mis un terme à son défi le 15 juillet 2020, a explosé le record du GR10 en traversant les Pyrénées (930 km pour 55 000 m D+) en 9 jours 9 heures et 30 minutes.
Le temps officiel pourrait même être revu à la baisse car la balise GPS aurait été déclenchée avant le départ réel du Nantais. Le temps réel devrait être aux alentours de 9 jours 9 heures et 15 minutes selon les informations données sur sa page Facebook.
C’est en quelque sorte son cadeau de 40 ans : Érik Clavery tente depuis dimanche soir de battre le record de la traversée du sentier de grande randonnée 10 (GR10) dans les Pyrénées. Le Nantais s’attaque à un gros morceau, puisque le parcours est composé de 930 km pour 55 000 m de dénivelé positif. Le record actuel est détenu par Thierry Corbarieu en 12 jours et 10 h, mais Érik estime pouvoir compléter le tracé en 10 jours.
Initialement, il aurait dû débuter son aventure le 10 juin, mais en raison de la pandémie et des mesures qui ont été prises par le gouvernement lors du déconfinement, il a préféré décaler son départ au 5 juillet à 18 h dans la ville de Banyuls-sur-mer, point de départ du GR10. Il part donc de la côte méditerranéenne pour rallier la côte atlantique.
Érik Clavery est un coureur qui évolue sur toutes les distances de trail et d’ultra-trail. Il a été champion du monde de trail (88 km, 2200 m D+) en 2011, avant de remporter, la même année, la SaintéLyon (70 km, 1500 m D+). Il a également gagné l’Écotrail de Paris (80 km, 1500 m D+) en 2012, la Transmartinique (133 km, 5250 m D+) en 2013 ou encore le Grand to Grand Ultra (273 km, 4900 m D+) il y a trois saisons.
L’athlète a aussi de belles places à son palmarès avec deux 4e place sur la Diagonale des fous à la Réunion (170 km, 11 000 m D+) en 2009 et 2012, une 6e et une 8e place sur l’Ultra-Trail du Mont-Blanc (170 km, 10 000 m D+) obtenues respectivement en 2015 et 2018.
L’an dernier, il a terminé au pied du podium des championnats du monde de 24 heures avec une distance parcourue de 272,2 km, battant ainsi le record de France de la discipline.
Une envie d’aventure
« J’avais la volonté, après toutes les expériences sportives, course à pied ou autres, que j’ai pu faire, de vivre une nouvelle expérience tournée vers l’aventure parce je suis fan d’aventure et de personnes comme Mike Horn », a confié Érik Clavery à Distances+ quelques jours avant son départ.
S’il a choisi les Pyrénées, c’est à la fois pour des raisons pratiques, comme la durée de l’effort, mais aussi, et surtout, parce que « ça veut vraiment dire quelque chose pour moi, il y a un début et une fin. Traverser une chaîne de montagne, pour moi, ça avait du sens », explique l’intéressé.
S’emparer du record de vitesse de la traversée du GR10 n’était pas son objectif premier. « Le record, je ne l’ai même pas regardé au début. J’ai fixé mon objectif par rapport à mon potentiel propre et par rapport à ce que je pense pouvoir faire », admet le Nantais pour qui le record n’est qu’un « prétexte », voire un outil de communication.
Une connaissance partielle du parcours
Afin de s’imprégner du parcours, Érik Clavery a passé quelques jours dans les Pyrénées à la sortie du confinement, notamment pour repérer des passage dans l’Ariège. « C’est très dur, très hostile, très nature, très ˝agressif˝ par rapport au reste des Pyrénées, très difficile, très technique, donc j’ai voulu repérer. J’y suis allé deux jours pour avoir un aperçu sans toutefois tout reconnaître », souligne-t-il.
Lors de l’une de ses sorties préparatoires, il a été accompagné par Patrick Lescos, un coureur expérimenté, mais qui ne fait pas partie de l’élite, avec lequel Distances+ s’est entretenu. Ce dernier envisage de participer au défi sur quelques étapes de la traversée. « Si je me passionne pour des gens comme Érik, dit le chef d’entreprise, c’est parce qu’il n’y a pas beaucoup de sports où des amateurs comme moi peuvent partager des moments avec des athlètes de ce niveau. » Lescos avait rencontré Érik Clavery en 2016, lors d’un stage à la Dune du Pilat, pour préparer à l’époque le Marathon des Sables (240 km, 3500 m D+). Il avait été marqué par son humilité et son humanité, a-t-il raconté à Distances+.
Le séjour de reconnaissance dans les Pyrénées a permis au champion français de se tester et de voir si, malgré le confinement, il était prêt physiquement. « Sur ces quatre jours, j’ai fait 240 km et 14 000 m D+ en étant bien. Je n’ai pas la sensation d’arriver moins bien préparé que si on n’avait pas été confiné », se félicitait-il avant de partir a l’aventure.
Le coureur des Pays de la Loire connaît bien la fin du GR10 dans les Hautes-Pyrénées et le Pays Basque, puisqu’il a passé beaucoup de ses vacances d’enfance à y randonner avec ses parents et qu’il y est retourné à plusieurs reprises depuis. « Je préfère terminer par une partie que je connais beaucoup mieux et que je maîtrise, dit-il. J’habite sur Nantes et je connais beaucoup de monde sur la façade atlantique. Terminer là où des gens pouvaient me retrouver au final, c’était quand même plus agréable. »
Objectif de performance
Érik Clavery reste avant tout un compétiteur, mais il ne se focalise pas sur le chronomètre. Pour lui, il est simplement question d’aller au bout de lui-même. « J’espère pouvoir vraiment me déconnecter de la pression de me dire ˝il faut faire tant de kilomètres˝. L’idée, c’est vraiment d’avancer et de me concentrer sur l’instant présent », explique-t-il.
Pour maximiser ses chances, il sera accompagné par de nombreux coureurs qui feront office de meneurs d’allure. Ces athlètes peuvent faire partie de l’élite comme Nicolas Darmaillacq ou Patrick Bringer. Mais Érik Clavery souhaite aussi faire de cette aventure un moment de partage : toutes les personnes qui souhaitent l’encourager ou courir avec lui pourront le faire.
« Je mets quand même en vigilance ceux qui veulent m’accompagner. L’idée de partage est présente, mais ça reste aussi l’idée de performance et en aucun cas je vais me permettre d’attendre quelqu’un. Par contre, ceux qui peuvent me suivre, quelque soit la durée, ça sera avec plaisir », préfère prévenir l’aventurier.
Un avertissement qui fait sourire Patrick Lescos. « Lui, il a compris que j’allais courir à ses côtés, alors que je vais plutôt courir derrière », s’amuse-t-il
Dans cette aventure, Érik Clavery sera accompagné par une équipe d’assistance. Il s’est notamment offert les services d’une kinésithérapeute pour l’aider à récupérer lors de ses arrêts. Il est aussi en contact avec un météorologue qui lui donne des prévisions afin de pouvoir aviser d’éventuels changements de plans en fonction de la météo. Il bénéficie également d’un camping-car pour avoir un maximum de confort lors de ses arrêts.
Il pourra aussi compter sur les personnes qui suivent son aventure et qui viendront le voir. Ceux qui souhaitent le rejoindre pourront savoir exactement où il en est grâce à une position GPS relayée sur son site Web.
« Pouvoir l’encourager quand il passe, de partager un moment le soir avec lui au bivouac, c’est là que je retrouverai mon plaisir », avance Patrick qui sera « heureux d’apporter sa pierre à l’édifice », ne serait-ce qu’en « lui remplissant sa gourde ou en le motivant s’il en a besoin. »
La gestion du sommeil
Érik Clavery est un coureur qui a une solide expérience des courses en montagne. Pourtant, pour ce défi il a une inquiétude : gérer son sommeil. Lui qui se qualifie de gros dormeur, prévoit de découper ses journées en trois parties : 19 h de course, 4 h de sommeil et 1 h pour les transitions (ravitaillement, changement d’équipement).
« Sur 10 jours avec un tel effort, le corps a besoin de phase de sommeil profond. Une phase de sommeil correspond à 1 h 30, donc je vais faire le double et même me laisser un peu de marge », précise-t-il.
Pour gérer au mieux son sommeil, il n’a pas hésité a consulter différentes personnes comme son ami Thomas Coville, navigateur chevronné, notamment vainqueur de la Transat Jacques-Vabre en 2017, et donc habitué à peu dormir pendant une longue durée, ou des participants à la Transpyrénéa.
Un film de sa traversée sera réalisé afin de « raconter l’aventure, mais aussi de présenter la beauté de l’environnement et du cadre naturel ainsi que des rencontres faites lors de l’aventure », mentionne Érik Clavery.
À lire aussi :
- Stéphane Ricard réalise un temps de référence sur le GR du Vieux Chaillol
- Jean-Adrien Michel court 234 km en 34 h sur le GR34
- Vincent Viet et ses amis créent un nouvel itinéraire entre Annecy et Chamonix