La championne du monde de trail Blandine L’Hirondel réquisitionnée à La Réunion pour participer à « l’effort de guerre »

La Française Blandine L'Hirondel a remporté la Skyrhune 2019
La Française Blandine L'Hirondel a remporté la Skyrhune 2019 au Pays basque. Une course du circuit Golden Trail Series. - Photo : Cyrille Quintard

Distances+ a réalisé l’entrevue de la championne du monde de trail sur l’île de La Réunion avant l’interruption de toutes les courses dans le monde en raison de la pandémie de coronavirus. Blandine L’Hirondel venait de remporter sa deuxième course en 2020, le Trail des Anglais, fin février.

C’est auréolée d’un titre de championne du monde de course en sentier 2019 que la Française Blandine L’Hirondel s’est installée sur l’île de La Réunion pour terminer son internat de médecine. Distances+ l’a rencontrée à l’arrivée du Trail des Anglais, une course nerveuse et variée de 28 km et 1260 m D+, qu’elle a dominé avec autorité, allant jusqu’à talonner les meilleurs hommes. L’athlète originaire de Normandie a décroché la cinquième place au général en gardant tout du long un large sourire qui ne semble jamais la quitter.

On est en contact!

On n'envoie pas de spam :)

On est en contact!

On n'envoie pas de spam :)

Depuis le début de sa carrière, la jeune femme de 29 ans brille et remporte presque toutes les courses auxquelles elle prend part. Sur ses 12 dernières courses, elle en a gagné 9 et a systématiquement fini sur le podium. Elle a soulevé son premier trophée mondial face à de grandes vedettes internationales à l’image de la Néo-Zélandaise Ruth Croft, des Espagnoles Azara Garcia et Sheila Aviles ou de la Néerlandaise Ragna Debats. Blandine L’Hirondel a aussi signé une impressionnante victoire au classement général, devant tous les athlètes masculins, sur le Tour de la Géla (41 km, 3300 m D+) au Grand Raid des Pyrénées, sans oublier une troisième place prestigieuse aux championnats du monde de course en montagne longue distance en Argentine fin 2019.

Blandine vient de passer près de six mois sur l’île de La Réunion, dans l’océan Indien, où elle avait déjà fait une partie de ses études. Elle y avait alors découvert la course en sentier et participé à ses premiers trails, en 2016, avec Oxytrail, « un petit club du sud de l’île ».

Elle devait repartir à la fin du mois, et notamment s’entraîner fort pour plusieurs des grandes compétitions internationales, mais elle a été réquisitionnée par l’hôpital de Saint-Benoît, où elle officie au service de gynécologie, et restera au moins jusqu’à la fin du mois de mai pour participer à « l’effort de guerre » dans la lutte contre le coronavirus. Nous revenons avec elle sur sa carrière. Celle d’avant la pandémie.

Blandine L'Hirondel a remporté le Trail des Anglais 2020
Blandine L’Hirondel a remporté le Trail des Anglais (28 km, 1260 m D+)
sur l’île de La Réunion en février 2020 – Photo : Gil Victoire

Distances+ : Depuis quand pratiques-tu la course en sentier?

Blandine L’Hirondel : Pendant mon enfance, j’ai plutôt pratiqué la danse et la gymnastique, jusqu’à mes 18 ans. Je suis venue à la course à pied plus tard, notamment lors de mon séjour à La Réunion. Là, j’ai découvert pleinement le trail avec plusieurs courses en 2016-2017. J’avais eu de bons résultats au niveau local. J’ai également pratiqué l’entraînement en salle de sport. Ensuite, je suis rentrée en métropole pour poursuivre mes études à Bordeaux. N’ayant pas à proximité des sentiers montagneux pour aller m’entraîner comme à La Réunion, je me suis davantage investie dans les séances de fractionné sur piste et cela m’a permis de progresser dans le cadre d’un entraînement plus cadré, plus rigoureux.

Être interne en médecine, cela ne doit pas te laisser beaucoup de temps libre. Comment arrives-tu à concilier ton métier et un entraînement de haut niveau?

Le souci du métier de médecin, c’est qu’on sait quand la journée débute, mais pas forcément quand elle va se terminer. Je dois également assurer des gardes de 24 heures. Du coup, je n’ai pas de réelle routine d’entraînement, mais j’ai du temps pour aller m’entraîner après mes gardes.

Le lundi, c’est ma journée de repos. Le mardi, j’arrive à m’entraîner le matin entre 5 h et 6 h, avant de partir travailler. Le mercredi, je pars faire un footing avec des côtes ou du plat au programme. Quant au week-end, je me consacre au vélo avec mon compagnon pour compléter mon entraînement de course à pied.

Ta formation médicale est-elle utile dans ta manière de t’entraîner?

On me pose souvent cette question. À la réflexion, l’apport de mes études est davantage du ressort de la force mentale. Quand je veux quelque chose, je vais au bout de mon effort, je ne lâche rien. Ma formation médicale, du fait notamment de mon emploi du temps, m’aide à ne pas en faire trop.

Privilégies-tu le volume ou la qualité?

Clairement, je ne suis pas adepte des gros volumes d’entraînement. C’est d’ailleurs un principe que me demande de respecter mon entraîneur, Philippe Propage (l’entraîneur des équipes de France de course sur sentier). Parfois, je me dis que je devrais en faire davantage quand je vois d’autres athlètes qui en font beaucoup plus que moi. Mon entraîneur me demande d’arrêter de me comparer et me dit que ce sont les autres qui devraient se comparer à moi. En revanche, j’insiste sur le renforcement musculaire. Il m’arrive d’en faire chez moi. Je fais notamment beaucoup de gainage.

Raconte-nous l’ambiance de l’équipe de France que tu as découverte. Est-ce que ton intégration s’est bien déroulée?

Quand je suis arrivée la première fois, j’étais hyper impressionnée de me retrouver avec des athlètes tels que Nicolas Martin ou Adeline Roche. J’étais intimidée, mais au final, nous sommes tous pareils et j’ai été mise à l’aise. Nous partageons la même passion, les mêmes contraintes.

Pour l’instant, tu brilles sur de courtes et moyennes distances, as-tu envie d’allonger les formats et d’aller vers les ultras?

Pas forcément. Les ultras, cela exige beaucoup de volume d’entraînement, d’engagement. C’est difficile à envisager, notamment en tant que femme, si un jour on veut des enfants, de tout gérer. Du coup, je n’ai pas d’objectif à terme dans ce type de format. Mais il ne faut jamais dire jamais.

Et s’entraîner à plein temps, devenir professionnelle, ça te tenterait?

Oh non! Je n’ai pas fait neuf ans d’études pour tout lâcher d’un coup et ne faire que courir. D’une part, mon métier est prenant, c’est une vocation et il est difficile de travailler à mi-temps, même si cela reste possible. Mais je suis attachée à un équilibre dans lequel la course à pied n’est qu’un élément, ne me consacrer qu’à la course à pied reviendrait à casser cette notion de plaisir. Je n’ai pas de commanditaire personnel, je n’appartiens à aucune équipe sponsorisée, je cours sous les couleurs d’un club de ma région natale (Alençon Running Club) où j’ai des amis.

Quelle course rêverais-tu de gagner?

Il y a un an, j’aurais dit les championnats du monde de course en sentier, ou bien les Jeux olympiques, si ceux-ci accueillaient une épreuve de course en sentier. Aujourd’hui, j’aimerais gagner une course mythique comme Sierre-Zinal (Suisse) ou Zegama-Aikorri (Pays basque espagnol).

La Française Blandine L'Hirondel après sa victoire sur la Skyrhune 2019
La Française Blandine L’Hirondel après sa victoire sur la Skyrhune 2019 – Photo : Cyrille Quintard

Lors de cette entrevue, Distances+ s’est également intéressé aux objectifs 2020 de Blandine L’Hirondel, mais dans les circonstances, nous avons jugé pertinent de retirer sa réponse. Il y avait d’ailleurs en premier sur sa liste l’édition 2020 de Zegama, dont les organisateurs viennent d’annoncer l’annulation. Au moment d’écrire ses lignes, Sierre-Zinal était encore au programme. La championne espérait également retrouver l’équipe de France de trail. Il n’y a pas de championnat du monde de course en sentier cette année, mais elle aimerait participer aux championnats du monde de course de montagne longue distance à Lanzarote (aux îles Canaries, en Espagne) en novembre. La course de sélection devait avoir lieu à l’occasion des championnats de France de course en sentier dans le cadre de La Pastourelle, en Auvergne, mais la Fédération française d’athlétisme a annoncé le 3 avril le report des championnats de France de trail, tandis que La Pastourelle a été annulée cette année. 

À lire aussi :