On ne fait pas que des rencontres agréables lorsque l’on court en pleine nature. Outre les tiques, que nous avons déjà évoquées ici, fuyez la très urticante herbe à puce! Lorsqu’on l’effleure, on s’en souvient!
Un peu de botanique et de taxinomie pour commencer. L’herbe à puce est une plante de la redoutable famille des Anacardiaceae. Cette famille est responsable à elle seule de plus de dermatites de contact allergiques (inflammations cutanées) que toutes les autres familles de plantes combinées. Elle se subdivise en plusieurs genres, parmi lesquels le Toxicodendron qui remporte la palme du plus populaire. Ce dernier se décline à son tour en plusieurs espèces, dont notre fameuse herbe à puce que l’on appelle aussi toxicodendron radicans, sumac grimpant ou encore bois de chien.
L’herbe à puce est une plante sauvage originaire d’Amérique du Nord. On la trouve un peu partout au Canada et aux États-Unis, et parfois en Asie de l’Est (Chine, Corées, Japon…) et en Amérique du Sud.
La dermatite de contact allergique est provoquée par une exposition à l’urishiol
L’urushiol est une toxine présente dans la sève de l’herbe à puce. C’est l’élément irritant qui provoque la réaction cutanée lorsque la plante entre en contact avec la peau.
Pour qu’il y ait réaction allergique, il faut d’abord que notre peau ait été exposée à l’herbe à puce. Une majorité d’enfants auront déjà été sensibilisés avant l’âge de 8 ans. On estime que 9 personnes sur 10 sont sensibles à l’urishiol et que 25 à 40 millions d’Américains auront recours à un médecin annuellement suite à une exposition.
Première étape : savoir reconnaître l’ennemi au gré des saisons
On reconnaît la plupart des membres du genre Toxicodendron à ses trois feuilles, dont la centrale est plus longue et plus étroite que les deux autres. Chacune des feuilles est habituellement asymétrique et peut présenter une entaille d’un côté. Les plantes peuvent être rampantes, dressées et buissonnantes ou grimpantes. Les feuilles sont rougeâtres au printemps et deviennent vertes en été. À l’automne elles prennent différentes teintes de jaune, d’orange et de rouge. Au mois de juin et juillet, l’herbe à puce produit des fleurs de couleur crème. Des fruits ronds et cireux de couleur verte ou jaune apparaissent en septembre.
La dermatite de contact
Les démangeaisons peuvent se présenter 4 à 96 heures après une exposition et seront à leur apogée après 1 à 14 jours. De nouvelles lésions peuvent apparaître jusqu’à 21 jours après l’exposition. Les lésions guérissent naturellement entre une à trois semaines après l’exposition initiale. Il arrive toutefois de rester sans le savoir en contact avec des restes d’urishiol sur du linge, des animaux ou des ongles contaminés. L’apparition de lésions sur plusieurs zones du corps qui ont été exposées peut donc être décalée dans le temps et donner l’impression que le « rash » s’étend, ce qui n’est pas le cas.
Quand l’infection s’ajoute à l’irritation
La complication la plus fréquente est la surinfection par le streptocoque bêta-hémolytique de groupe A ou le staphylocoque aureus que l’on pourra traiter à l’aide d’une antibiothérapie topique ou orale selon les cas.
Comment apaise-t-on les symptômes de la dermatite de contact ?
Pour limiter les dégâts, il faut laver le plus rapidement possible les zones de peau qui ont été exposées à l’herbe à puce. On peut retirer jusqu’à 50 % de l’urushiol si on se lave dans les 30 premières minutes. Ce pourcentage tombe à zéro après seulement une heure. Le lavage est crucial, mais il doit être délicat pour ne pas abîmer le film protecteur qui se trouve à la surface de la peau. C’est pourquoi il est aussi recommandé de laver la zone concernée à l’eau froide et de remplacer le savon par une solution de vinaigre (2 cuillères à soupe dans 1 tasse d’eau, soit 30 ml de vinaigre dans 250 ml d’eau) ou d’alcool (1/2 tasse alcool + 1/2 tasse d’eau). L’eau froide dilue la sève et referme les pores de la peau pour empêcher le « poison » d’y pénétrer. Vous l’aurez compris, il est par ailleurs crucial de bien nettoyer les vêtements et les ongles.
L’application de calamine et de pansements humides peut apaiser partiellement les démangeaisons.
Le recours aux solutions à base d’acétate d’aluminium (Buro-Sol) peut également contribuer à réduire la réaction inflammatoire.
Les crèmes cortisonnées à haute concentration peuvent accélérer l’assèchement des bulles qui se sont formées sur la peau.
La prescription de cortisone par voie orale (prednisone) peut être requise pour les cas les plus sévères.
La prise d’anti-histaminiques, qui luttent contre les allergies, est peu utile vu l’absence d’histamine impliquée dans cette réaction de contact. Leur effet sédatif peut toutefois être apprécié pour favoriser le sommeil la nuit.
Voilà chers coureurs, soyez aux aguets et dans le doute d’une exposition une petite saucette dans le premier ruisseau venu pourrait vous sauver bien des tracas!
Simon Benoit est médecin de soins critiques en urgence, en plus de tenir une pratique de bureau axée sur la médecine sportive. Il est membre de l’Association québécoise des médecins du sport. Il est également diplômé en physiothérapie et en chiropratique et est ambassadeur de La Clinique du Coureur. Lisez tous ses textes !