Ils font désormais partie de notre quotidien. Les masques barrières sont devenus un accessoire indispensable et les coureurs n’y échappent pas.
Plusieurs équipementiers sportifs ont décidé, en cette période de pandémie, d’utiliser leurs chaînes de production pour fabriquer des masques grand public, à l’image de Salomon, Nike, New Balance ou encore Oxsitis.
Des marques, comme La Sportiva, ont également saisi l’opportunité d’un nouveau marché pour se lancer dans la confection de masques conçus spécifiquement pour la pratique d’une activité sportive ou de plein air.
Des sacs d’hydratations ou des chaussettes de course aux masques en coton
L’entreprise de Clermont-Ferrand Oxsitis, spécialisée notamment dans les sacs d’hydratation sportive pour les traileurs, a rapidement utilisé son savoir-faire en matière de fabrication de vêtements de sports pour produire des masques en coton. Ça lui a permis de maintenir un minimum d’activité tout en participant à la mobilisation nationale pour combler la pénurie de masques qui a marqué le début de la crise sanitaire en Europe.
« Le fait qu’on n’ait pas d’activité commerciale dans le domaine du sport depuis le mois de mars a permis d’accélérer le projet et de maintenir une activité pour l’entreprise, raconte Fabien Andrieux, président et fondateur d’Oxsitis. La demande a rapidement grandi et on a commencé à lancer la fabrication de masque en tissu réutilisable à ce moment là. »
La Chaussette de France (LCF), spécialisée dans les chaussettes de sports plein air, est l’un des derniers fabricants de bas en France. Pour tenter de sauver l’entreprise de Troyes, dans l’Aube, et une cinquantaine d’emplois, son président, Benoit Seguin, a lui aussi décidé de faire fonctionner l’usine à plein régime. Elle tourne donc 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 avec 10 machines qui sont utilisées d’habitude pour fabriquer des chaussettes de ski. LCF a la capacité de fabriquer 200 000 masques par mois.
LCF envisage de poursuivre cette activité tant qu’il y aura de la demande.
Un masque pour courir en montagne
La marque italienne La Sportiva a pour sa part lancé il y a quelques jours un masque spécialement conçu pour la pratique des activités plein air, baptisé le Stratos.
Au prix de 19 euros (29 $ CAD) avec 30 filtres jetables, il cible clairement des utilisateurs sportifs. Dans un communiqué, l’équipementier estime d’ailleurs qu’il est particulièrement adapté pour les sports en montagne « où, en raison du dénivelé, il faut faire attention au risque de transmission verticale du virus, en plus de celui horizontal, explique le président de La Sportiva Lorenzo Delladio. C’est pourquoi nous avons accordé la plus grande attention à l’ergonomie et à l’enveloppement du produit ».
Ce masque, indique le communiqué, « est réalisé avec un tissu respirant 3D Mesh et du Lycra moelleux avec un traitement antibactérien (…) pour plus d’hygiène et de respirabilité, même en condition d’aérobie. » Il permettrait de filtrer 99 % des bactéries et des virus transmis par voix buccale, comme les masques chirurgicaux. Ce Stratos est lavable et réutilisable, mais ses filtres sont jetables.
Fabien Andrieux émet pour sa part des réserves quant à la viabilité et la pérennité de ce marché, tout en s’intéressant au sujet. « On voit certaines marques qui commencent à discuter de ça. Est-ce que c’est pour le buzz marketing? s’interroge le patron d’Oxsitis, en précisant à Distances+ qu’il réalise justement en ce moment, avec son équipe de recherche et développement, des tests d’utilisation durant des activités physiques comme le vélo ou la course à pied.
S’entraîner avec un masque sur le nez et la bouche?
Dans le monde du sport de haut niveau, des athlètes professionnels s’entraînent parfois avec des masques prévus pour limiter l’apport en oxygène, afin de simuler des conditions d’altitude, et ainsi développer leur musculature respiratoire. Alors est-il possible de reproduire ce type d’exercice avec un masque textile? Non, selon Jean-Charles Vauthier, médecin en chef de l’Infernal Trail des Vosges et collaborateur de Distances+, d’autant que la pratique de l’entraînement avec un masque « est réservée aux sportifs de très haut niveau et on ne sait pas vraiment si ça fonctionne. »
Dans le cadre de ses tests, le fondateur d’Oxsitis calcule la respirabilité des différents masques. « En fonction du tissu utilisé, on voit qu’il y a des niveaux de respirabilité qui sont complètement différents. Ça peut aller de 50 ml/seconde à 450 ml/seconde pour nos masques quand la moyenne tolérée par la Répression des fraudes et pour que le produit soit conforme et acceptable en terme de porté est autour de 90 ml/seconde », développe-t-il.
Le chroniqueur santé de Distances+ Simon Benoît estime que le port du masque est utile « seulement lorsqu’on se trouve dans une situation où on ne peut pas respecter les recommandations de distanciation sociale ».
Il est possible de faire du sport avec un masque tout en respirant de manière correcte, mais cela signifie que « le masque laisse passer l’air facilement. Et il va aussi laisser passer les postillons plus facilement », ajoute Jean-Charles Vauthier.
Il affirme que courir avec un masque peut très rapidement devenir gênant et peu protecteur. « Quand on porte un masque longtemps, au bout d’un moment, on a mal à la tête. On est en hyperventilation, on a des problèmes de gaz carbonique dans le sang. On ne va pas respirer comme d’habitude, on va forcer sur le masque, donc courir en forçant sur sa respiration. Les coureurs ne vont pas se sentir bien. »
Il se souvient de quelqu’un qui faisait du vélo de montagne avec un foulard tubulaire épais qu’il avait remonté jusqu’à son nez. En raison de l’épaisseur du vêtement, le cycliste a rapidement éprouvé des difficultés pour respirer et a fini par faire un malaise. « Quand on court avec un masque, on n’est pas bien, on est fait pour respirer le tout grand ouvert », assure Jean-Charles Vauthier.
Mauvaise utilisation du masque
Plutôt que de risquer de se sentir mal en courant avec un masque, le médecin préfère recommander de respecter les gestes barrières. « Les règles sont de rester distants les uns des autres quand on court et de ne pas multiplier les gens avec qui l’on court. S’il y en a un qui tombe malade dans un groupe, ça ne fait que quelques personnes à tester, mais si on court avec 30 personnes différentes tous les jours, s’il y en a un qui tombe malade en trois jours, ça fait pratiquement 100 personnes à tester, et ça n’est pas possible », commente Jean-Charles Vauthier.
Son homologue québécois, Simon Benoit, alerte sur la mauvaise utilisation des masques qui les rendent caduques. « On voit beaucoup de choses qui rendent le port du masque pire que tout, affirme-t-il. Comme le descendre sur le menton ou encore le mettre dans sa poche et le ressortir au besoin ».
L’affirmation de l’efficacité du port du masque est basée sur des études qui ont été menées dans des conditions d’utilisation optimale, dit le Doc Benoit. Or, « dans la population, en général, c’est catastrophique et ça donne une fausse réassurance. »
À lire aussi :
- Comment courir à l’ère de la distanciation sociale
- Les meilleurs conseils pour reprendre l’entraînement après le confinement
- Confinés à la maison, le yoga et la méditation permettent de rester actifs et serein