Damien Humbert
Mise à jour post-course – L’Américain Dakota Jones a remporté la Transvulcania 2023, 11 ans après sa première victoire sur l’Ultramarathon (6 h 59 en 2012, 7 h 02 en 2023) devant le Français Damien Humbert (7 h 10) – par ailleurs collaborateur de Distances+ et auteur de l’article ci-dessous – et l’Italien Andreas Reiterer (7 h 17). L’Italienne Martina Valmassoi, vainqueure de la TDS 2022, a gagné la course chez les femmes (9 h 09) devant la Polonaise Edyta Lewandowska (9 h 21) et la Sud-Africaine Meg Mackenzie (9 h 28).
La Transvulcania faisait partie du calendrier des Skyrunner World Series depuis la création du circuit en 2013. Depuis la 20e édition, en 2022, cette mythique course à travers les volcans de l’île de La Palma, aux Canaries, fait partie du circuit UTMB World Series. L’édition 2023 qui se déroule le 6 mai s’annonce aussi somptueuse que relevée à l’avant de la course.
Un parcours exigeant à la géographie atypique
La Transvulcania, créée en 2009, s’est fait connaître sur la scène mondiale avec son fameux parcours de 74 km et ses 4400 m de dénivelé positif (pour 4100 m de dénivelé négatif). On retrouve sur son tracé toutes les spécificités de l’île qui font à la fois son charme et la difficulté de l’épreuve. Palma est l’une des îles les plus montagneuses de l’archipel des Canaries avec sa colonne vertébrale volcanique et les nombreux sommets à plus de 2000 mètres d’altitude qui l’accompagnent.
Cette géographie atypique lui confère une grande variété de microclimats au moment de s’élancer sur les GR 130 et 131 qu’empruntent le parcours. Ainsi, contrairement à ce que l’on voit sur les côtes de l’hémisphère nord, la côte ouest de l’île est plus sèche que l’extrémité est. Une forêt de nuage prend place dès 600 m d’altitude lorsque l’on se trouve à l’Est alors qu’il faut monter à 1000 mètres pour observer le même phénomène à l’Ouest. Ces zones côtières oscillent entre arides et semi-arides. Quant à la topographie, au-dessus du nuage, on retrouve des forêts de pins des Canaries aux alentours de 1500 m, puis une steppe aride à partir de 1800 m, où la neige peut faire de brèves apparitions en hiver.
Le point de départ se situe à l’extrémité sud de l’île, au phare de Fuencaliente. Les coureurs empruntent ensuite toute une ligne de crêtes formée par une succession de cratères volcaniques très récents. Le dernier est entré en éruption en septembre 2021, en contrebas du parcours. Les dégâts matériaux sur l’ouest de l’île avait entraîné l’annulation de l’édition 2021 de la Transvulcania.
Cette partie du parcours culmine à 1900 m, sous le cratère du Deseada, et offre aux coureurs un terrain doux avec des sentiers de sable volcanique, parfois recouverts d’aiguilles de pins des Canaries. La descente sur l’Area Recreativa del Pilar (km 24,5) marque la fin de cette portion. S’ensuit une longue partie vallonnée sur une crête menant à la caldeira du volcan Taburiente où se situe le point culminant de la course, El roque de los muchachos, à 2428 m d’altitude (km 50).
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À cet endroit, la crête est beaucoup plus minérale et abrasive que sur la première partie du parcours, tout comme la longue descente de 20 km qui suit pour rejoindre le bucolique village de pêcheurs de Tazacorte. Par beau temps, les vues sont impressionnantes et vertigineuses sur l’océan ainsi que les îles voisines de Tenerife, La Gomera et El Hierro.
Bien que la ligne d’arrivée approche, il faut rester vigilant et surtout avoir encore quelques ressources au moment d’aborder les cinq derniers kilomètres. En se dirigeant vers Los Llanos de Aridane, l’ultime partie peut se révéler être la plus chaude du parcours. D’abord en abordant un canyon asséché, puis une montée pavée exposée au soleil. Le tout comporte quelque 350 m D+.
Un palmarès étincelant, surtout à partir de 2012
La beauté du parcours et le niveau de compétition à l’avant de la course chaque année depuis des lustres font aujourd’hui la renommée de la Transvulcania.
Chez les hommes, les trois premières éditions avaient consacré des coureurs espagnol, avant que l’épreuve ne prenne son envol international, en 2012. Les records ont évolué et progressé en même temps que le prestige de cette épreuve. Lors de la première édition, Salvador Calvo Redondo, le vainqueur, avait bouclé les 74 km en 9 heures. Sept ans plus tard, le triple champion du monde Luis Alberto Hernando a pulvérisé ce temps de référence en passant la ligne après 6 h et 52 min d’efforts intenses.
Chez les femmes, Marta Prat Llorens avait été la première à établir une marque, en 13 h 37 min. En 2017, la Suédoise Ida Nilsson (qui a remporté en cette fin avril l’épreuve Major de l’UTMB World Series sur le continent américain, The Canyons Endurance Runs by UTMB) a, elle aussi, annihilé ce chrono en remportant la Transvulcania en 8 h et 4 min.
Les Suédoises ont souvent brillé sur cette course. Emelie Forsberg a inscrit son nom deux fois au palmarès en 2013 et 2015 tandis qu’Ida Nilsson compte trois victoires consécutives à son actif entre 2016 et 2018. La Néerlandaise Ragna Debats a remporté l’édition 2019. Seule la Néo-zélandaise Anna Frost (2012 et 2014) et l’Américaine Abby Hall (2022) sont parvenues à rompre cette hégémonie européenne.
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Malgré son internationalisation, les Espagnols ont souvent bien figuré à domicile au classement général, notamment avec la victoire de l’incontournable Kilian Jornet en 2013 (6 h 54). Pour la petite histoire, le Catalan avait tenté l’aventure l’année précédente, mais avait connu une rare défaillance, permettant à l’Américain Dakota Jones de le devancer. Quant au détenteur du record de l’épreuve, Luis Alberto Hernando, il a réalisé le triplé entre 2014 et 2016, après avoir terminé deuxième de l’édition 2013. Son compatriote Pere Aurell Bove (7 h 37)a également gagné la Transvulcania en 2018.
Quelques athlètes ont su malgré tout tirer leur épingle du jeu. Après Dakota Jones, un second Américain s’est imposé en 2017, en la personne de Tim Freriks (7 h 02), de Flagstaff. Le Français Thibaut Garrivier a gagné la Transvulcania en 2019 (7 h 11) après avoir terminé troisième en 2018. Le dernier vainqueur en date n’est autre que le prodige suédois Petter Engdhal (victime cette année d’une défaillance lors du MIUT). Il a parcouru les 74 km en 7 h 10 après avoir impressionné sur le CCC lors de l’Ultra-Trail du Mont-Blanc.
État des lieux des forces en présence
Sur la distance reine, la compétition – qualificative à la fois pour l’OCC et la CCC en cas de podium – s’annonce féroce en 2023.
Chez les femmes, un duel entre la Sud-Africaine Megan Mackenzie, 8e de la CCC 2022 et l’Espagnole Sheila Aviles était attendu, mais la championne de l’OCC 2022 a annoncé qu’elle a dû être opérée d’urgence cette semaine à la suite d’une déchirure totale du tendon tibial postérieur de sa jambe gauche lors d’une sortie à La Palma. La Française Fiona Porte, 3e du Grand Trail des Templiers 2022, devait être au départ également, mais elle a renoncé à faire le voyage aux Canaries en raison d’un problème administratif. Elle sera donc plutôt au départ du Trail Nivolet Revard en Savoie.
En revanche, l’Italienne Martina Valmassoi, victorieuse de la TDS 2022 sera au départ pour jouer devant. Elle a remporté il y a quelques jours le Genova Trail, un 46 km avec 2700 m de D+.
Chez les hommes, le retour de l’ancien lauréat Dakota Jones pourrait être perturbé par les Espagnols Andreu Simon, vainqueur de la Transgrancanaria 2023, et Pablo Villa, vainqueur de la même épreuve en 2021. Il faudra aussi compter sur l’Italien Andreas Reiterer, 3e de la CCC et du championnat du monde de trail long 2022, le Français spécialiste des longues distances, Germain Grangier, vainqueur du Val d’Aran by UTMB 2022 (162 km, 10 600 m D+), et le Chinois Yanqiao Yun, vainqueur du Puerto Vallarta Mexico by UTMB 2022 (100 km, 3000 m D+).
Selon la liste des participants de l’Ultramaraton, on retrouve aussi, entre autres élites, les Américains Jared Hazen et Tim Freriks, l’Italien Davide Cheraz ou encore le vainqueur de la TDS 2021, le Norvégien Sebastian Krogvig, qui avait terminé 3e du Lavaredo cette année-là et 2e du Trail 100 Andorra by UTMB en 2022. Il faudra garder un oeil également sur le Vénézuélien d’Annecy Moises Jimenez, à l’aise sur ce type de format (2e de la Mascareignes au Grand Raid de La Réunion et récent vainqueur d’un 70 km au Argentine, El Paso Austral).
Le format 50 km, le Volcanoes Trail et son nouveau tracé de 48 km et 2850 m D+ sera également disputé avec en tête d’affiche Martin Dematteis, Yoel De Paz et, chez les féminines, Moana Kehres.
Enfin, sur le format 20 km, El Roque Promesas (28 km, 840 m D+ et 2932 m D-) sera très adapté aux profils descendeurs dont les jeunes Espagnols Leire Fernandez et Josep Miret feront sans doute partie.
Damien Humbert est l’un des cinq meilleurs traileurs français sur les formats demi-maratrails (autour de 20-30 km). Il a terminé deuxième du circuit Skyrunner World Series 2022, derrière l’Espagnol Nicolas Molina. Il se projette sur les plus longues distances et sera présent au départ du 74 km de la Transvulcania avec l’objectif de réaliser un chrono entre 7 h et 7 h 20, ce qui le place parmi les prétendants à la victoire. Damien reprendra ensuite le chemin des épreuves de skyrunning avec Hochkönigman, Schlegeiss, la Skyrace du Mercantour et Gorbeia Suzien. En cas de qualification pour une finale UTMB, Damien Humbert penche « plutôt pour une OCC » étant donné qu’il est engagé sur un 100 km en décembre en Australie, le Kosciuszko 100 by UTMB.
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