Après deux éditions annulées, par des chutes de neige en 2019 et à cause de la pandémie en 2020, la Hardrock 100 (160 km, 10 000 m D+), se déroule ce week-end avec un plateau relevé. Ils ne seront que 146 coureurs à s’élancer de Silverton pour cette 26e édition de la célèbre course dans le Colorado. Au milieu d’une grande majorité d’Américains, les Français seront représentés par François D’Haene et Julien Chorier, vainqueur de l’épreuve en 2011. Plusieurs autres vainqueurs de la Hardrock seront d’ailleurs au rendez-vous.
Trace GPX téléchargée sur le site de la Hardrock 100
François D’Haene conseillé par Kilian Jornet
François D’Haene n’a jamais participé à la Hardrock 100, mais il a déjà pris la deuxième place de la Western States (160 km, 6000 m D+), l’autre célèbre ultra-trail américain, en 2018, derrière l’intouchable Jim Walmsley (trois fois vainqueur de l’épreuve).
« François kiffe cette course! En plus, il l’attend depuis quatre ans, donc il y va vraiment une grosse envie », assure Jean-Michel Faure Vincent, le directeur des équipes élites de Salomon et très proche de François D’Haene qu’il accompagne depuis plusieurs années dans ses aventures. Lors de la dernière édition de la Hardrock, en 2018, l’ultra-traileur du Beaujolais n’avait pas été tiré au sort.
Le triple vainqueur de l’UTMB (qui cette année tente le défi d’enchaîner Hardrock-UTMB) est présent dans le Colorado depuis le 2 juillet afin de s’acclimater à l’altitude et à la météo, et reconnaître le parcours. Il a notamment reconnu la montée de Handies Peak, point culminant de la course à 4280 m d’altitude, et Kroger’s Canteen, un « passage clé » comme il l’a qualifié sur ses réseaux sociaux. « Il a fait des sorties jusqu’à 50 km pour repérer en grandeur XXL », a indiqué Jean-Michel Faure-Vincent à Distances+, ajoutant qu’il y a « une grosse bulle de chaleur sur les États-Unis en ce moment ».
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François D’Haene a révélé qu’il avait demandé quelques conseils à Kilian Jornet, quatre fois vainqueur de la Hardrock 100. Ce dernier lui a, entre autres, recommandé « de ne pas trop forcer dans les premières montées » pour ne pas le « payer après » en raison de l’altitude et « d’essayer de rester le plus sec possible » tout au long de la course.
Concernant le parcours, le détenteur du record de l’épreuve (dans les deux sens du parcours) a expliqué que dans le sens antihoraire (chaque année, la course se déroule dans la direction opposée à celle de l’année précédente) « les montées sont plus longues et plates, et les descentes sont très raides ».
Selon Jean-Michel Faure Vincent, le coureur de l’équipe Salomon devra surtout se méfier de l’amplitude de température. « Tu peux avoir très très froid la nuit, parce que tu as une nuit en haute-altitude, et après tu as une zone de 20 bornes où il fait toujours super chaud, illustre-t-il. C’est le seul endroit où tu as des grandes pistes, mais, malheureusement, c’est aussi le seul endroit où tu n’as pas d’air. »
Jim Walmsley et Dakota Jones comme pacer
Le Français devait possiblement être pacé par Mathieu Blanchard, mais les restrictions sanitaires ont contraint le coureur du sud de la France qui vit depuis plusieurs années au Québec à revoir ses plans, loin de l’Amérique du Nord. Ce sera donc un coureur américain qui accompagnera François D’Haene, et pas n’importe lequel puisqu’il s’agit de Jim Walmsley, triple vainqueur de la Western States.
Le meilleur coureur de 100 miles (160 km), selon l’ITRA, avait tenté en off, l’année dernière, de battre le record de Kilian Jornet avant de finalement abandonner après 120 km.
François D’Haene pourra également compter sur Dakota Jones, deuxième de l’épreuve en 2011 et troisième en 2012. L’Américain possède lui aussi de solides références avec notamment une victoire sur le Pikes Peak Marathon en 2018 (42 km, 2376 m D+)
« La problématique du pacer sur cette course, c’est qu’il faut qu’il connaisse vraiment le parcours et qu’il devienne un peu ton GPS pour que, pendant un moment, tu ne te stresses plus sur la direction que tu prends et que tu te laisses un peu aller », explique Jean-Michel Faure Vincent.
Selon le « team manager » de Salomon, le scénario de la course est difficile à prévoir, car il y a toujours « des garçons qui partent super fort » et qui sont « des archi-spécialistes de cette course ». La plupart du temps, il s’agit de coureurs américains que l’on ne voit pas forcément sur d’autres ultras et qui « se focalisent uniquement sur la Hardrock ».
La stratégie élaborée par le duo est simple : « c’est que François fasse sa course sans se soucier des autres parce que la course est tellement longue et il y a tellement de rebondissements qu’on sait que, s’il fait sa course, il va être compliqué à sortir [de la gagne]. »
« Par contre, s’il se réfère à quelqu’un qu’on ne connaît pas vraiment, il se met en danger », d’une certaine manière, fait remarquer Jean-Michel Faure Vincent.
La troisième fois pour Julien Chorier
Un autre sérieux client français sera au départ de la Hardrock 100, Julien Chorier, 10 ans après sa victoire dans le Colorado. Il avait également décroché la 2e place en 2014, derrière Kilian Jornet. Le vétéran de l’ultra-trail français n’a plus couru sur le sol américain depuis sa 6e place en 2015 à la Western States.
« À quelques jours de la course, je suis vraiment excité à l’idée de prendre pour la 3e fois le départ de cette aventure, s’est enthousiasmé Julien Chorier, contacté par Distances+ en Californie. Je ne sais pas si l’acclimatation sera suffisante et si j’aurai récupéré du voyage, mais je n’ai pas de bobos et l’envie est là. »
Julien reste discret sur ses ambitions, même s’il semble plutôt confiant.
« Je vais essayer de faire une course régulière sans me soucier des autres concurrents. Le but sera de finir cette boucle en n’étant pas trop loin de mon chrono de 2011 (25 h 17), pour voir le poids des années sur moi », confie-t-il avec humilité, face à cette montagne qu’il connaît bien, tout en misant sur son compatriote. « Je pense que, sur cette édition, François D’Haene est vraiment en forme », glisse-t-il.
Jeff Browning et Dylan Bowman en embuscade
La concurrence sera féroce face aux deux tricolores puisque le tenant du titre Jeff Browning, vainqueur en 2018 après la disqualification de Xavier Thévenard, sera présent. Malgré son abandon sur la Western States, il a remporté le Zion 100 (160 km, 2830 m D+) en avril et devrait encore se mêler à la lutte ce week-end pour défendre sa couronne. L’Américain est habitué à enchaîner la Western States et la Hardrock 100, un enchaînement qui lui a déjà réussi par le passé puisqu’il a terminé respectivement 3e et 4e en 2016, et 5e et 1er en 2018.
Dylan Bowman sera aussi un prétendant sérieux à la victoire bien qu’il participera à sa première Hardrock 100. À 35 ans, l’Américain a un beau palmarès avec des victoires sur l’Ultra-Trail du Mt-Fuji en 2018 (167 km, 7610 m D+), le 103 km du 100 miles du Tarawera Ulramarathon en 2018 (3950 m D+). Il compte également une 3e place de la Western States en 2014, une 2e à la TDS en 2018 (122 km, 6770 m D+) ou encore une 7e place à l’UTMB lors de l’édition royale de 2017 (170 km, 9980 m D+) remportée… par François D’Haene.
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À 48 ans, Troy Howard pourra miser sur son expérience. L’Américain a participé à quatre éditions et a terminé à chaque fois dans le top 5, deux fois 2e (2009, 2013), une fois 3e en 2018 (après la disqualification de Xavier Thévenard) et 5e en 2015.
Jamil Coury pourrait aussi jouer les trouble-fêtes, lui qui a terminé deux tours lors de la Barkley Marathon cette année. Le coureur de l’Arizona a déjà terminé 9e à l’arrivée à Silverston en 2017.
Courtney Dauwalter grande favorite
Chez les femmes, la reine mondiale de l’ultra-trail, Courtney Dauwalter, qui a entre autres remporté l’UTMB et la Western States, célébrera sa première participation à la Hardrock. L’Américaine battra-t-elle le record de Diana Finkel sur le sens anti-horaire (27 h 18 min et 24 s en 2009)? Ce sera l’un des suspens de la compétition.
Fidèle à son palmarès et à sa capacité à compétitionner avec leurs meilleurs hommes, Courtney pourrait aussi aller chercher une belle place au classement général, quelques semaines après les performances de haute volée des femmes sur la Western States (trois athlètes féminines dans le top 10 et neuf dans le top 20).
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La tenante du titre (2018), Sabrina Stanley, sera présente pour se mêler à la lutte. La jeune trentenaire a remporté les sept courses dont elle a pris le départ depuis sa victoire à la Hardrock 2018, notamment la Diagonale des Fous 2019 (168 km, 9610 m D+) à l’île de La Réunion. Elle avait par ailleurs terminé troisième de la Western States en 2017.
Meghan Hicks sera une autre des principales concurrentes de Courtney Dauwalter. Elle aura pour avantage d’avoir déjà participé à cette course, où elle avait terminé 7e en 2015 et 5e en 2016.
L’expérimentée Betsy Nye sera également au départ. La vétérane, déjà présente en 1999 sur l’épreuve, s’est toujours montrée très performante sur la Hardrock 100. Elle a remporté la victoire en 2003, une deuxième place en 2006 et neuf troisièmes places (de 1999 à 2001, 2007, 2008, 2010, 2011, 2013 et 2014). Elle avait terminé 6e en 2016 et en 2018. À 56 ans, elle prendra part à sa 17e Hardrock 100.
Enfin, à 60 ans, la quintuple vainqueure de l’épreuve Betsy Kalmeyer (la plus titrée sur l’épreuve avec Karl Meltzer) prendra, elle aussi, une nouvelle fois part à la course du Colorado, sa 19e participation. Sa première victoire remonte à 1996 et elle s’est classée 3e au classement général à deux reprises, en 2001 et 2006 (deuxième meilleure performance pour une athlète féminine derrière la deuxième place de Diana Finkel en 2010).
Un texte écrit avec la collaboration de Nicolas Fréret