Échappée Belle : victoire de l’expérimenté Cédric Chavet dans un final à rebondissements

Cédric Chavet a remporté L'Échappée belle 2020
Cédric Chavet a remporté L'Échappée belle 2020 - Photo : Bruno Lavit

Le premier gros ultra-trail de la saison post-confinement en France a tenu ses excitantes promesses, ce week-end, dans le massif de Belledonne. De nombreux coureurs élites avaient coché le format intégral de l’Échappée Belle (149 km et 11 400 m D+), où le caillou est roi, pour enfin accrocher un dossard sur un tracé technique rude. Sous un soleil de plomb, c’est l’expérimenté Cédric Chavet qui a créé la surprise, signant sa plus belle victoire en carrière en 27 h et 23 min, avec seulement 12 min d’avance sur Renaud Rouanet, qui lui non plus ne figurait pas parmi les grands favoris de l’épreuve.

Stéphane Evêque-Mourroux a complété le podium (27 h 52) devant le Suédois Petter Restorp et Ugo Ferrari. Ces trois-là ont une meilleure cote ITRA que leurs prédécesseurs.

Chez les femmes, Juliette Blanchet s’est imposée avec autorité et 30 min d’avance sur Céline Finas et Daphné Aglave Guibert.

Un départ de feu

Départ masqué de L'Échappée Belle 2020
Départ masqué de L’Échappée Belle 2020 – Photo : Bruno Lavit

La course a démarré sur les chapeaux de roue. Jean-Marie Thévenard et Ugo Ferrari sont partis à toute vitesse sur ce terrain jonché de pierres où « la moindre erreur de concentration peut engendrer une chute », selon le parrain de l’épreuve, Sébastien Chaigneau.

Les deux coureurs sont même passés au ravito du refuge de la Pra, au km 27, sous les temps de passage du record de François D’Haene établi l’an dernier (23 h 55). « C’était voulu, a raconté Ugo après son arrivée. N’étant pas très à l’aise dans les cailloux, je me suis dit que si je pouvais gagner un peu de temps, c’était sur ce début de course où les hostilités n’étaient pas encore complètement lancées. »

Petter Restorp s’est placé derrière ce duo sur cette première partie de compétition.

Jean-Marie Thévenard au top avant de rejoindre son frère Xavier

Le cadet de la fratrie Thévenard est parvenu à garder un rythme élevé et a pris seul la tête. Quant à Ugo Ferrari, il s’est fait rejoindre puis dépassé par Cédric Chavet, l’ancien international de ski de fond Benoît Chauvet, qui participait là à son premier ultra trail, et Stéphane Evêque-Mourroux.

Le trio pointait à 10 minutes de la tête à la base de vie du Pleynet au km 64, avant d’entamer le difficile passage empruntant le col du Moretan à 2500 m d’altitude ainsi que sa terrible descente à travers une partie tout d’abord glacée puis très minérale, technique et glissante.

Jean-Marie Thévenard a pu bénéficier de l’expérience de son aîné Xavier qui l’a accompagné sur cette deuxième partie, en tant que meneur d’allure de luxe.

Puis la défaillance à quelques kilomètres de l’arrivée

L'Échappée Belle est l'un des ultras les plus techniques en France
L’Échappée Belle est l’un des ultras les plus techniques en France – Photo : Bruno Lavit

Mais alors que tout le monde le voyait déjà sonner la célèbre cloche en vainqueur, Jean-Marie Thévenard a été pris de violents vomissements au milieu de la nuit. Il a fini par abandonner au Pontet, à une quinzaine de kilomètres de l’arrivée.

Resté longtemps en embuscade, Cédric Chavet en a profité. Il a géré sa course en vieux brisquard et réalisé la course parfaite, et c’est bien lui qui a passé le premier la ligne d’arrivée à Aiguebelle.

« Je pensais que la victoire était pour Jean-Marie, même si j’avais trouvé son début de course très rapide et que j’étais étonné qu’il tienne aussi longtemps, a commenté à chaud le Bourguignon. En ultra, tant que la ligne n’est pas franchie rien n’est fait ».

La consécration à 45 ans pour Cédric Chavet

Cédric, qui participait à l’Échappée Belle pour la deuxième fois, appréhendait la course pour plusieurs raisons. La première d’entre elles, c’est qu’il connaissait l’extrême difficulté du parcours. « J’avais échoué au pied du podium en 2016 après avoir été longtemps dans le trio de tête », se souvient-il. Il n’était pas non plus certain d’avoir totalement récupéré du Montreux Festival, où il avait terminé 4e ex aequo il y a un mois. La « densité exceptionnelle du plateau », dont plusieurs traileurs mieux cotés que lui au classement international de l’ITRA, ne le laissait pas non plus indifférent.

« J’ai vécu la course en cherchant à prendre un maximum de plaisir et surtout aller au bout de ce gros chantier, a-t-il dit à Distances+. Je suis parti avec le groupe de poursuivants sur un rythme très rapide, trop rapide même selon moi, sur les premières heures pour que cela se termine sans casse. Mauvaises expériences obligent, même après le ravitaillement de Val Pelouse (km 118) où Jean Marie Thévenard souffrait d’un gros coup de moins bien, je suis resté calme en prenant la tête de course sans être euphorique. Au final, j’ai fait ma course comme je fais habituellement sur un rythme le plus régulier possible et sans me laisser aspirer de trop par des coureurs plus jeunes et peut-être mieux “motorisés”. J’ai encore du mal à réaliser. Et succéder au palmarès de cette course exceptionnelle au grand François (D’Haene) est un moment important de ma carrière sportive. »

Cette grande victoire est pour Cédric Chavet un aboutissement, dont il a pu profiter avec sa femme Cathy qui l’assiste sur tous ses ultras. « Au-delà d’une victoire individuelle, c’était une aventure collective exceptionnelle qui récompense un gros investissement personnel et familial depuis près d’une douzaine d’années au moins. »

Il tentera dans deux mois d’atteindre son Graal et de remporter la Diagonale des fous, à laquelle il participera pour la septième fois. Son ami Antoine Guillon l’a remporté en 2015 à 45 ans, souligne-t-il. Ça tombe bien, j’ai eu 45 ans lundi dernier… »

La « remontada » de Renaud Rouanet

Le coureur du Vercors Renaud Rouanet, qui pointait en 16e position au deuxième ravitaillement, a remonté ses adversaires un à un pour décrocher une belle deuxième place. « Après le ravitaillement de Val Pelouse (km 118), j’ai commencé à voir la frontale du 3e. Je me sentais bien, j’ai continué ma stratégie de course et ça a payé », s’est-il félicité à l’arrivée.

« J’ai vécu une course presque parfaite, a-t-il reconnu après avoir récupéré un peu : un départ prudent, basé sur mon expérience de 2016 où j’avais déjà pris la 2e place, avec malgré tout une petite baisse de régime liée à la chaleur durant la deuxième moitié d’après-midi, vendredi, et jusqu’à la nuit et la descente du Moretan. Puis, la fraîcheur de la nuit et l’économie de course réalisée en début de parcours m’ont permis d’améliorer tous mes temps de passage jusqu’à l’arrivée sur ma course de 2016. J’ai mis 50 minutes de moins au final. Ce qui m’a permis au passage de réaliser une belle remontée.

Une édition rondement menée, même masquée

La Française Juliette Blanchet a remporté L'Échappée belle 2020
La Française Juliette Blanchet a remporté L’Échappée belle 2020 – Photo : Bruno Lavit

L’événement s’est déroulé comme espéré, même si les organisateurs assurent avoir douté jusqu’à la dernière minute de la tenue de l’événement pour raison sanitaire.

« Le système de départ par vagues fluidifie au final les taux de présence sur les ravitaillements et enlève une certaine pression aux bénévoles », a estimé Sylvie Quercia, de l’organisation de l’Échappée Belle. Tout s’est merveilleusement bien passé, et très simplement, les coureurs comprenant et acceptant parfaitement le protocole sanitaire (désinfection des mains et port du masque) mis en place à l’entrée des différentes bases de vie. « C’était presque militaire, a pour sa part ironisé Ugo Ferrari, mais c’est un très bel exemple de réussite dans ce contexte. »

Un texte co-écrit avec Nicolas Fréret


Classements de l’Échappée Belle 2020

Intégrale (149 km)

Homme

  • 1- Cédric Chavet 27 h 23
  • 2- Renaud Rouanet 27 h 35
  • 3- Stéphane Évêque-Mourroux 27 h 52

Femme

  • 1- Juliette Blanchet 35 h 05
  • 2- Céline Finas 35 h 36
  • 3- Daphné Aglave Guibert 36 h 18

Traversée Nord (87 km)

Homme

  • 1- Édouard Laudier 13 h 16
  • 2- Sébastien Gérard 13 h 46
  • 3- Jean-Adrien Michel 13 h 59

Femme

  • 1- Hilary Allen 15 h 39
  • 2- Estelle Patou 16 h 25
  • 3- Pauline Gaidet 17 h 33

Parcours des crêtes (57 km)

Homme

  • 1- Benjamin Roubiol 06 h 49
  • 2- Louison Coiffet 07 h 11
  • 3- Sylvain Court 07 h 22

Femme

  • 1- Julie Roux 08 h 09
  • 2- Anna Comet 08 h 20
  • 3- Marine Quintard 08 h 30

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