Les Québécois écrasent la concurrence à Bear Mountain

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Elliot Cardin, Mathieu Blanchard et Alister Gardner / Photo : Vincent Champagne

DISTANCES+ À BEAR MOUNTAIN – C’est dans des conditions météo affreuses que les Québécois ont dominé la compétition lors de l’ultra de 50 miles (80 km) à Bear Mountain, la fin de semaine du 13 mai, dans l’état de New York.

Chez les hommes, le podium du The North Face Endurance Challenge est 100 % québécois. Mathieu Blanchard, qui court en sentier depuis seulement un an et qui avait à peine dormi la veille dans sa voiture, a eu suffisamment d’énergie pour emporter la première place en 7 h 32.

Elliot Cardin, l’un des jeunes espoirs de la course en sentier au Québec, l’a affronté dans les derniers kilomètres, pour finalement le perdre de vue et passer sous l’arche deux minutes plus tard, en 7 h 34.

Son ami et partenaire d’entraînement Alister Gardner est quant à lui arrivé 3e, en 7 h 47.

Les femmes ont été tout aussi excellentes. Hélène Michaux l’a emporté haut la main, en 8 h 51. Si la deuxième place est allée à une Norvégienne, c’est une autre Québécoise, Caroline Côté, qui a pris la troisième marche, en 10 h 36.

Il n’a pas cessé une seule seconde de pleuvoir sur toute la zone du parc national de Bear Mountain, des petites heures du matin jusqu’à tard dans la nuit. Pas un seul pouce de sentier n’est resté au sec. Des ruisseaux ont peu à peu remplacé les pistes, connues pour leur quantité impressionnante de cailloux de toutes les tailles. La boue en grande quantité a ralenti l’allure des coureurs et en a fait chuter plus d’un. Les organisateurs ont d’ailleurs rapporté un fort taux d’abandon.

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Mathieu Blanchard et Alister Gardner quelques minutes après l’arrivée de ce dernier / Photo : Maryline Tremblay

Mathieu Blanchard sur sa lancée

« Cette boue partout et ces roches, quand tu rajoutes par-dessus la pluie, ça devient des roches glissantes tout le long, raconte Mathieu Blanchard à Distances+. Au début, c’est rigolo, mais ça devient quand même long! »

« Je ne pouvais pas être dans de meilleures conditions pour attaquer une course », explique Mathieu, qui se dit « au top » sur le plan physique. Parti fort, il a gardé l’avance sur les autres dès le dixième kilomètre.

Sa forme physique est si bonne – il court entre 100 et 200 km par semaine ces temps-ci -, qu’il aurait pu faire un meilleur temps, estime-t-il. À cause de la pluie, « j’avais les pieds qui pesaient le double ou le triple par rapport à d’habitude. Quand je mettais le pied dans la boue, ça mettait du temps à partir. Je sentais que chaque fois il fallait lever la patte, c’était difficile. Pareil pour tout le ‘’gear’’, la veste, le sac, c’était lourd. »

Vers la fin du parcours, sentant que personne ne pourrait vraiment le rattraper en raison des conditions, Mathieu a beaucoup ralenti le rythme. « J’avais complètement lâché mon ‘’pace’’ », dit-il, ce qui aurait pu lui être fatal.

En effet, à l’avant-dernier point de ravitaillement, alors qu’il prenait tranquillement une petite soupe pour se réchauffer, Elliot Cardin est arrivé à toute allure. « C’était rigolo la scène parce qu’il demandait aux bénévoles ‘’il a combien de minutes devant, le premier, il est où?’’ J’ai dit : ‘’hey je suis juste là!’’

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Elliot Cardin peu de temps après son arrivée / Photo : Vincent Champagne

Elliot fort sur son premier 50 miles

« Il était juste à côté de moi », confirme Elliot Cardin, qui n’avait pas remarqué la présence d’un autre coureur au ravito. « On est repartis ensemble et on se suivait de super proche. On s’est tenus de même pendant à peu près dix minutes, mais les mollets ont commencé à cramper, alors j’ai ‘’slacké’’ un peu pour être sûr d’arriver fort à la ligne d’arrivée. C’était trop dur d’aller le chercher [Mathieu], je l’avais perdu de vue. Je me suis dit que j’allais continuer fort et voir ce que ça donnerait. » Le jeune athlète de 24 ans attaquait sa plus longue course à vie.

Malgré la pluie, Elliot a vraiment apprécié son expérience. « C’était top! », a-t-il lancé à Distances+ quelques minutes après la fin de sa course. Seul bémol, voire erreur de débutant, il a pris le départ avec des souliers neufs. « J’avais peut-être couru six kilomètres avec [avant la compétition]. Ils n’étaient vraiment pas cassés, alors je le sentais dans l’arche du pied. »

Sur le parcours, Elliott dit s’être « économisé ». « Au 40e kilo, j’ai rencontré un Européen, et j’ai vraiment ralenti le ‘’pace’’. J’ai roulé avec lui jusqu’au 60e kilo. On jasait, on n’allait pas trop trop vite », raconte-t-il. C’est l’arrivée inopinée d’un coureur derrière eux qui est venu le « booster ». Il s’agissait de nul autre que de son camarade Alister Gardner.

« On a couru ensemble jusqu’au prochain ravito, et rendu là, j’ai décidé d’accélérer, parce que je voulais le motiver aussi », confie Elliot. Malheureusement, Alister n’a pas pu tenir la cadence. « Je suis allé chercher Elliot au 60e kilomètre, mais avec l’effort que ça a pris, j’étais rendu à ma limite à ce point là. Les derniers 20 kilos, je les ai faits juste pour finir la ‘’job’’ », ajoute Alister Gardner.

Alister Gardner enfin sur le podium

Reste que l’accomplissement est de taille pour le Bromontois puisqu’après cinq participations à Bear Mountain il monte enfin sur le podium. « J’attendais ça depuis longtemps », s’est félicité Alister, qui était arrivé 4e l’an dernier, et dans le top 10 lors de ses autres participations.

Il se sentait en forme. Il y a un peu moins de deux mois, il avait accompli une performance d’élite au demi-marathon de New York, en le complétant en 1 h 15.

Malgré la pluie et le froid relatif, ce dernier a pris le départ de la course en camisole et short seulement. « J’ai dépensé de l’énergie pour rester chaud », regrette-t-il.

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Le podium 100 % québécois du 80 km de Bear Mountain 2017 / Photo : Sébastien Côté

Hélène Michaux première

Hélène Michaux a elle aussi ressenti les caprices de la météo. « Ce n’est pas une course qui a été le ‘’fun’’ tout le temps à cause du froid », a-t-elle reconnu. « Je suis quelqu’un qui craint le froid, je suis quelqu’un de frileux ». Cela ne l’a pas empêché de performer.

Elle en était  pour sa part à sa quatrième participation à Bear Mountain, et la troisième sur le 80 km. Elle avait terminé seconde les deux premières fois. C’est donc « fière et contente » qu’elle grimpe enfin sur la première marche, en complétant la course 11 minutes plus tard que lors de sa seconde position en 2015.

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Hélène Michaux au fil d’arrivée / Photo : Vincent Champagne

Avec un brin d’humilité, il faut le souligner. En effet, « il n’y avait peut-être pas le calibre qu’il y avait les autres années, remarque-t-elle. Il faut rester humble par rapport à ça. C’est pas le meilleur temps que j’ai fait ici, mais avec les conditions, je suis vraiment contente! »

Elle garde en mémoire une course récente en Californie où elle a eu le sentiment de ne pas s’être respectée. Mauvaise gestion de l’alimentation et mauvaise écoute de son corps, voilà des erreurs qu’elle ne voulait pas répéter.

Ainsi, Hélène a mis en oeuvre une stratégie conservatrice. « En général, je pars toujours avec des gens plus lents que moi, et c’est pas mal ce qui m’arrive dans toutes les courses en général, je pars plus lent, et finalement, après avoir été conservatrice, ça paye. »

À noter qu’Hélène Michaux, Alister Gardner et Elliot Cardin s’entraînent ensemble.

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Alister Gardner, Hélène Michaux et Elliot Cardin / Photo : Vincent Champagne

Caroline Côté réussit malgré les imprévus

Pour sa part, la coureuse Caroline Côté, qui se fait de plus en plus connaître comme cinéaste d’aventure, a réussi à surmonter ses craintes de la course en pleine nuit pour arracher la 3e place.

Un peu dernière minute – elle a prêté ses souliers à une amie et a emprunté ceux d’une autre – elle est arrivée sans gourde sur le site, en a ramassé une qui traînait et s’est dirigée vers le départ au pas de course sans allumer sa lampe frontale. Elle s’est frappé la tête contre un arbre et en est restée étourdie jusqu’aux premiers pas de course.

« J’ai dû me convaincre de ne pas arrêter au 20e km, précise-t-elle, parce que j’avais les mains qui commençaient à enfler et mes jambes pesaient très lourd. » Elle a réussi à tenir le coup en se répétant des phrases positives.

Plus de 150 Québécois ont participé à l’une ou l’autre des courses du The North Face Endurance Challenge de New York ce weekend. Les coureurs qui ont pris le départ des courses du dimanche (demi-marathon, 10 k, 5 k) ont eu plus de chance avec la météo, puisqu’il faisait grand soleil. Par contre, les sentiers étaient tout aussi boueux et gonflés d’eau.

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Tout mouillés après des heures sous la pluie, Elliot Cardin, Mathieu Blanchard et David Castonguay, qui a complété le 50 k. / Photo : Maryline Tremblay

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