Ça sent le printemps! L’envie de courir est là, mais que vous soyez restés actifs ou non durant l’hiver, attention aux blessures. Le risque est grand si vous ne respectez pas votre corps et que vous vous laissez aller à courir trop, trop vite.
La perspective des beaux jours est excitante. On se magasine de nouveaux vêtements, de nouvelles chaussures. On nage dans les résolutions et les objectifs de performances, de distances, d’aventures et de folies pour la saison chaude. Certains sont restés très actifs tout au long de l’hiver avec un entraînement croisé de ski de fond, de raquettes, de randonnées alpines ou de vélo intérieur. D’autres ont continué leur routine de coureurs-navetteurs, ont couru sur piste intérieure ou poursuivi leur passion de la course en montagne hivernale sur les splendides sentiers enneigés. Mais nous sommes tous concernés par les recommandations qui suivent, à suivre scrupuleusement :
Quantifier le stress mécanique
Tout coureur se doit de comprendre ce terme et de l’intégrer. Le corps humain est constitué de différents tissus osseux, cartilagineux, tendineux et musculaires qui ont chacun un potentiel d’adaptation au stress mécanique qu’ils subissent lors de différentes activités. Tout changement du niveau de stress mécanique sur un tissu provoquera une réponse. L’absence complète de stress induit le déconditionnement, l’atrophie et la fragilisation alors qu’un stress trop important ou répété qui outrepasse le seuil d’adaptation (surcharge) provoque la dégénérescence, la déchirure et l’inflammation.
Pour utiliser ce principe comme stratégie préventive, on doit quantifier et doser rigoureusement la progression du niveau de stress mécanique imposé aux tissus impliqués par le retour à l’entraînement. Ceci provoquera naturellement la mise en place par le corps de mécanismes d’adaptation qui rendront ce tissu plus fort, plus résistant et plus performant.
Augmenter progressivement le volume d’entraînement
La motivation du printemps fait bien des victimes. Le changement brusque vers une nouvelle forme d’activité et un trop grand volume d’entraînement d’un coup, plutôt qu’une augmentation progressive du volume de course à pied par sortie et par semaine, représente une source intarissable de blessures.
Les muscles, les surfaces articulaires ainsi que les attaches tendineuses et ligamentaires sollicités sont très variables d’une discipline à l’autre (raquette, ski de fond, skimo, vélo, etc.) Tout coureur qui a cessé la course à pied depuis plusieurs semaines se doit d’effectuer un retour progressif, même s’il a maintenu une belle forme cardiovasculaire avec un entraînement croisé pendant l’hiver.
Mieux vaut être plus conservateur que pas assez en début de saison.
On suggère des alternances marche-course lors des premières sorties, peu importe le niveau de performance de l’athlète. On doit mettre davantage l’accent sur la fréquence des sorties (4 à 6 sorties/semaine) que sur le volume des entraînements. Les mots clés à retenir sont « courts » et « fréquents ».
Plusieurs sources de programmes d’entraînement fractionnés sont disponibles. Je vous propose ceux de la Clinique du Coureur, disponibles gratuitement sur son site web.
Changement de foulée
Je vous suggère de faire évaluer votre foulée en ce début de saison. Nous savons qu’une foulée courte à cadence rapide (180 pas par minute +/- 10 ppm), légère (qui se jauge au bruit lors de l’impact au sol) et délicate est une excellente stratégie pour bonifier sa dynamique de course et pour prévenir les blessures courantes.
Attention! Là encore, si vous cherchez à modifier votre foulée, vous devez absolument y aller progressivement pour laisser le temps aux structures de s’adapter à ce changement significatif de biomécanique.
Changement de chaussures
Un changement de chaussure impose également une période de transition pour éviter les blessures. Le « fit » offert par la chaussure (avant-pied « toe box » étroit, large ou anatomique), sa flexibilité, son poids, l’épaisseur de la semelle, le dénivelé entre le talon et l’avant-pied ainsi que les technologies de stabilisation ou de contrôle influencent tous votre foulée et donc la répartition des charges sur le pied, le genou, la hanche et le dos. Il est donc fortement conseillé de débuter sa saison avec ses vieilles chaussures préférées de la saison précédente et d’effectuer une transition bien progressive vers vos nouvelles chaussures. Si votre modèle de chaussure n’est plus disponible, tentez d’en retrouver un nouveau qui comporte un maximum de similitudes. Si c’est un coup de cœur, retournez en magasin et achetez-en un maximum de paires.
Pour effectuer une transition vers une chaussure à plus haut ou plus bas indice minimaliste, consultez le répertoire d’indice minimaliste des chaussures, également sur le site de la Clinique du Coureur, afin de déterminer celui de votre chaussure actuelle et celui du modèle que vous convoitez. La principale règle est de ne pas effectuer plus d’une minute de course par entraînement avec une nouvelle chaussure en visant quatre semaines de transition par changement de 10% d’indice minimaliste. Oui, c’est long, mais c’est le prix à payer pour éviter une blessure qui vous immobiliserait peut-être plus longtemps encore.
Il n’est pas souhaitable d’être courbaturé pendant deux jours à la suite d’un entraînement mal dosé en début de saison. Il est nettement préférable de respecter la vitesse d’adaptation des tissus pour qu’ils nous permettent d’effectuer à nouveau un entraînement le lendemain. Soyez disciplinés, rigoureux et patients et vous serez récompensés par une longue vie équilibrée de coureur heureux et satisfait. N’hésitez pas à consulter un professionnel et à encourager vos boutiques locales lors de vos achats.
Simon Benoit est médecin de soins critiques en urgence, en plus de tenir une pratique de bureau axée sur la médecine sportive. Il est membre de l’Association québécoise des médecins du sport. Il est également diplômé en physiothérapie et en chiropratique et est ambassadeur de La Clinique du Coureur. Lisez tous ses textes !