Pragmatique, généreuse et enjouée, Christiane Grégoire est à l’aube de la soixantaine, avec plus de 40 années de course à pied au compteur. Elle est une coureuse émérite bien connue dans le milieu de la course au Québec. Toute sa vie, elle s’est fait un devoir d’être une ambassadrice des saines habitudes de vie auprès de sa famille, ses amis et ses collègues de travail. Pour Christiane, la course en sentier est une véritable fontaine de Jouvence, le meilleur moyen de rester jeune de cœur, de corps et d’esprit.
« J’ai encore l’impression d’avoir le dessus sur la nature… pour l’instant », s’enthousiasme celle qui s’est classée pour les Championnats canadiens de course en montagne, à Vancouver, en 2015. « Je suis arrivée la première de ma catégorie et, si je veux être honnête, des femmes de mon âge, il n’y en a pas beaucoup qui courent et c’est facile d’être parmi les trois premières », dit-elle en riant.
Apprendre à composer avec ses limites
Christiane sait bien que la courbe de décroissance physiologique la rattrape aussi, comme elle atteint tout le monde éventuellement. Au lieu de chercher à dépasser ses limites, elle dit donc vouloir maintenant composer avec celles-ci. « J’ai fait le constat qu’à 25 ans, je voulais être la meilleure, qu’à 40 ans, je voulais être la meilleure de ma catégorie et qu’à 60 ans, je veux seulement être au meilleur de moi-même », réalise la coureuse.
Une fois passée la cinquantaine, une année peut même faire toute une différence, explique-t-elle. Il vient un temps où l’on peut commencer à avoir de la difficulté à suivre un certain groupe. « Le fait de toujours se retrouver en queue de peloton, essoufflée, n’est pas agréable du tout. Le problème, c’est qu’on finit par se dire que l’on n’aime plus courir alors que l’inconfort provient du fait que l’on court avec ce groupe », fait remarquer Christiane.
De belles découvertes peuvent pourtant encore être faites en changeant simplement de partenaires de course afin de tenir compte de nos capacités physiques, suggère-t-elle. Christiane a d’ailleurs développé une technique personnelle pour ses sorties de course. Elle fait 1 km en courant et 100 m en marchant. « Ainsi, je ne me sens jamais à bout d’énergie, malgré mon âge », explique-t-elle.
Le plaisir comme recette magique
Cela dit, elle est consciente que la course n’amène pas tout de suite ses bienfaits lorsqu’on a un certain âge. Cela prend quelquefois du temps, plus de temps qu’à
30 ans, et c’est dommage selon elle, car les gens se découragent plus vite. Pour Christiane, « c’est parce qu’on s’y prend mal et qu’il n’y a pas de plaisir. Immanquablement, la douleur s’installe, on se blesse et on se dit que le jeu n’en vaut pas la chandelle ». Elle explique qu’il ne faut pas se décourager parce qu’on ne fait pas tout ce que les autres publient sur Facebook, par exemple. « On se sent alors rapidement dépassé. »
En vieillissant, la raison profonde qui fait qu’on décide de bouger ou de continuer à bouger ne peut plus être basée sur nos seules capacités physiques, selon la sexagénaire. « On abandonnera, c’est certain, c’est perdu d’avance. La course n’est pas juste une affaire de corps, c’est aussi une affaire de cœur. »
Pour Christiane Grégoire, la motivation à courir devrait tout simplement être d’avoir du plaisir! « Ce qui te fait vibrer dans la vie, ce qui te fait plaisir, c’est ce qui fera en sorte que ça va durer dans le temps malgré tes capacités physiques qui diminuent et les petits bobos qui sont de plus en plus présents. » Il n’y a pas un spécialiste de l’entraînement, pas une personne qui va réussir à faire bouger quelqu’un de façon durable, si ce dernier n’en retire pas du plaisir, peu importe son âge, insiste-t-elle. « C’est une recette magique pour maintenir le mouvement! »
Réaliser l’urgence de vivre
Christiane est ainsi de ceux pour qui la motivation, peu importe leur âge, est à l’intérieur de soi. « Notre seule limite est celle de notre volonté qui, malgré ce que notre corps nous dit, peut nous accompagner plus loin qu’on le pense dans la pratique de notre sport », souligne celle pour qui le vieillissement du coureur n’est donc pas juste un enjeu physiologique à gérer.
« Avec le temps, on apprend à apprécier les petites choses de la vie. On réalise l’urgence de vivre. Mais déjà, le fait de pouvoir bouger est un privilège que je chéris tous les jours. » C’est cette sérénité de savourer l’instant présent qui fait selon elle toute la différence.
Christiane s’arrête ainsi souvent, lors de ses courses et entraînements, pour prendre des photos et admirer les paysages. « C’est ce que j’aime de la course en sentier. Tout se renouvèle sans cesse, même si c’est étrangement toujours le même sentier », fait-elle remarquer.
Une génération de plus en plus active
De ce qu’elle voit, les gens âgés sont de plus en plus actifs, pour la plupart. Ils ont le goût de faire des activités hors de l’ordinaire, mais pas au même niveau que les jeunes de 20 ou 30 ans, qui recherchent souvent la performance. Christiane suggère même aux organisateurs de course et aux administrations municipales de laisser plus de place à cette catégorie de sportifs dans leur offre d’activités. « Pourquoi ne pas avoir une catégorie baby-boomers, par exemple? »
Aux lecteurs, Christiane Grégoire laisse le message suivant : « Sportifs de plus de 50 ans, ne nous laissons pas intimider par le jugement des autres et courons pour le simple plaisir de le faire, et ce, à notre rythme. Que chacun trouve sa propre raison de courir selon ses capacités! »