Rémi Loubet, le « survivant » qui a remporté l’Ultra-Trail Atlas Toubkal

Victoire de Rémi Loubet à l’UTAT 2018 – Photo : Laurence Tangé

DISTANCES+ À OUKAÏMEDEN – Le vainqueur de l’Ultra-Trail Atlas Toubkal (UTAT) 2018, Rémi Loubet, 31 ans, n’est pas très connu dans le monde de l’ultra-trail. Et pour cause, c’est seulement la deuxième fois qu’il prenait le départ d’une course en sentier longue distance. La première fois, c’était déjà l’UTAT, en 2017. La course faisait alors 97 km pour 6500 m de dénivelé. Il avait terminé au pied du podium.

Cette année, la course reine de l’UTAT s’est considérablement compliquée, avec presque 10 km de plus, mais surtout avec 1500 m de dénivelé additionnel, autrement dit un nouveau col à plus de 3000 m d’altitude à franchir.

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Aventurier, montagnard aguerri et athlète pluridisciplinaire (ski alpinisme, vélo de montagne, escalade, course en sentier),  Rémi avait le profil pour damer le pion aux élites de la course en sentier au départ (Mathieu Blanchard, Matthias Dippacher, Markus Kirschner, Kristin Berglund Martina Trimmel), ce qu’il a fait avec brio, en surclassant la concurrence, reléguant son dauphin, Sébastien Robert, à plus d’une heure et demie.

« C’est un vrai trail de montagne, où ça court très peu, a-t-il commenté. Il est très exigeant au niveau de l’altitude et de la technicité des chemins. Je ne dirais pas que c’est réservé au montagnard, mais quand même, on voit bien que ceux qui gagnent ici ne sont pas forcément ceux qui gagnent ailleurs.

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Le village éphémère de l’UTAT, installé sur le plateau d’Oukaïmeden – Photo : Tobias de St-Julien

Miracle

C’est un petit miracle que Rémi Loubet ait été présent cet automne. Lors de sa dernière expédition à ski en Alaska, en mai, il a été emporté dans une avalanche sur plus de 400 m. Par chance, il n’a pas été enseveli et s’en est tiré avec une double fracture de la mâchoire et une fracture de la tête de l’humérus. Il a maintenant une plaque de métal dans l’épaule. Il a repris l’entraînement le 1er août après deux mois de convalescence. Huit semaines plus tard, il a passé la ligne d’arrivée de l’UTAT avec émotion.

« J’ai cogité toute la journée, a-t-il confié à Distances+. J’ai repensé à l’accident. J’ai tendance à balayer les choses, mais je me suis forcé à y penser. Je me suis dit que c’était génial ce que j’étais en train de faire, que c’était un cadeau de la vie. Je prends aujourd’hui les choses avec un peu plus de philosophie et ça m’a fait progresser. »

Lorsqu’il est arrivé avant la tombée de la nuit à Oukaïmeden, Rémi Loubet a laissé exploser sa joie, passant la ligne en faisant la roue par-dessus le bandeau UTAT, avant de sauter littéralement dans les bras du patron de la course qu’il a embrassé sur le crâne.

« Je crois que ça y est, je suis guéri », a-t-il sobrement écrit après sa victoire sur sa page Facebook, en prenant soin de remercier tous ceux qui lui avaient permis de se remettre sur le pied, de la plus belle des façons.

Sa prochaine expédition est prévue au printemps prochain au Groenland.


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L’UTAT, plus qu’un dossard, une expérience humaine

Cyrille Sismondini, qui a créé l’UTAT il y a 10 ans, a voulu développer avant tout une expérience pour que les amoureux de la montagne viennent découvrir le Haut Atlas marocain, son terrain de jeu adoré, si loin de tout qu’il a fallu mettre au point un réseau radio autonome afin d’assurer le suivi de la course.

Il n’a jamais voulu céder à la logique de la vente d’un simple dossard. « Ce que j’offre pour tout le monde, et j’y tiens, c’est un séjour de quatre ou cinq jours au cours desquels on vit ensemble, a-t-il expliqué. C’est ça ou rien. Je ne veux pas de mecs qui arrivent, qui prennent un dossard, et qui s’en vont. »

Le séjour coûte 350 euros (530 dollars canadiens) tout compris sur place.

Quand on lui demande si l’UTAT est l’ultra le plus dur au monde, il répond que c’est possible, mais que ce n’est pas un objectif. « J’ai renoncé à mon projet initial de faire le tour du Toubkal – le sommet d’Afrique du Nord – qui ferait 120 km pour 12 000 m de dénivelé. Personne n’aurait fini et ça, ça m’intéresse pas, assure-t-il. Ce qui me plaît, ce n’est pas qu’il soit le plus dur, c’est qu’il ait du caractère. »

Assez, peut-être, pour dissuader la plupart des plus grands coureurs en sentier, Kilian Jornet en tête, de venir se confronter à l’Atlas, ce qui, à force, déçoit le patron de l’UTAT, triste de ne pas avoir su les convaincre. Pas encore du moins.

Photo : Anass Errihani
Photo : Anass Errihani