Mélodie Gilbert, la révélation 2021 du trail québécois

Mélodie Gilbert
Pour sa première saison, Mélodie Gilbert a remporté toutes les courses de trail auxquelles elle a participé - Photo : Ultra Trail Harricana

Auteure d’une saison incroyable pour ses débuts dans le trail, avec quatre victoires en quatre courses de 25 km, la Sherbookoise Mélodie Gilbert, 27 ans, compte bien confirmer cette année. Elle est revenue pour Distances+ sur cette première saison très prometteuse, elle qui ambitionne de participer dans les prochains mois à des courses encore plus relevées pour se frotter au gratin de la course en sentier au Québec.

La pandémie n’est pas pour rien dans la transition de Mélodie Gilbert vers la course en sentier, alors qu’elle pratiquait la course à pied sur piste et en cross-country avec l’équipe de son université, les Verts et Or de Sherbrooke.

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« On n’avait plus accès à la piste d’athlétisme et on ne pouvait plus faire d’entraînement en groupe, se souvient-elle. Je courais encore plus que d’habitude parce que je n’avais rien d’autre à faire de mes journées, mais je courais beaucoup sur la route. » 

Et puis un jour, elle a accompagné une amie qui allait courir en montagne. « On a joggé quelques petites parties et je me suis rapidement dit « c’est le fun », raconte-t-elle. Après ça, j’y suis retournée plusieurs fois toutes seules et j’ai adoré! »


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Mélodie explique avoir particulièrement apprécié l’atmosphère, différente de ce qu’elle connaissait. En montagne, elle ne « regardait plus [sa] montre », ni son « pace » et profitait simplement d’être dans la nature. « Sur la track, ce sont des intervalles à la seconde près où tu regardes toujours ton pace, tout est calculé. Là, c’était comme libérateur », s’enthousiasme la néophyte.

Arrivée fracassante en compétition

Mélodie Gilbert
C’est sur le cross-country que Mélodie a fait ses armes dans la course à pied – Photo : Sébastien Desbordes

Grande compétitrice dans l’âme et habituée à l’université à participer à de nombreuses courses, Mélodie Gilbert a rapidement voulu se confronter aux autres traileurs. Il y a pourtant un monde entre les cross-country de 8 km, relativement plats, mais où la densité est énorme, et les trails de 25 km avec du dénivelé, mais où les coureurs sont un peu plus éparpillés sur le parcours.

« J’ai toujours trouvé les cross trop courts, s’amuse-t-elle. J’aurais toujours aimé qu’ils soient plus longs. » Forte de son expérience sur demi-marathon, elle s’est dit qu’elle devrait pouvoir s’aligner sur des épreuves de 25 km en trail. « Je ne savais pas à quoi ça correspondait en terme de temps, 25 km avec du dénivelé, se souvient Mélodie. Donc je suis allée m’entraîner en faisant un peu de dénivelé et j’ai vite compris que ça allait être beaucoup plus long qu’un demi-marathon. »

Elle a frappé fort d’entrée de jeu en remportant les quatre courses auxquelles elle a participé en 2021, toutes aux alentours de 25 km, à savoir le Gaspesia 100 (24 km, 980 m D+), le Québec Méga Trail (25 km, 820 m D+), l’Ultra-Trail Harricana du Canada (28 km, 920 m D+) et le Bromont Ultra (25 km, 1040 m D+).


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Elle a également participé au Marathon de Verdun qu’elle a remporté fin septembre en 2 h 58 min 44 s.

Puis elle a terminé sa formidable saison, fin octobre, avec une 5e place au championnat canadien de course en montagne lors du Trail du Massif du Sud, qui consistait en une ascension verticale de 7 km pour 525 km de dénivelé positif cumulé. Elle est arrivée derrière de grands noms de la course en sentier québécoise, comme Sarah Bergeron-Larouche, qui a remporté le titre, et Hélène Michaux, qui a passé la ligne moins de 9 secondes avant Mélodie.

« C’était moins dans mes forces, je gagne plus souvent mes courses en descente qu’en montée », a commenté Mélodie, qui aura à cette occasion engrangé une expérience de plus.

Elle demeure « surprise » par ses performances, avoue-t-elle. « À chaque course, je me disais que je n’avais aucune chance et qu’il y avait trop de niveau. J’étais là pour donner mon meilleur, mais je ne m’attendais pas à performer autant », a-t-elle confié à Distances+.

Cette saison fracassante lui a d’ailleurs valu la Racine d’or de «  l’athlète qui a connu une première saison de trail du tonnerre  ».

Adaptation physique, mentale et matériel 

Mélodie Gilbert
Mélodie Gilbert – Photo : Courtoisie

Le chemin pour arriver à ce niveau de performance a toutefois été long et son expérience en tant que physiothérapeute lui a été extrêmement bénéfique, estime-t-elle. D’entraînements relativement courts et intenses sur la piste, il a fallu passer à des sorties en nature, rallonger les distances et accumuler le dénivelé.

« Au début, je ne faisais qu’une sortie par semaine en trail. Puis j’ai augmenté graduellement le temps et le dénivelé de mes sorties. J’ai commencé par des petits dénivelés de 300 ou 400 m, puis je suis montée jusqu’à 800 voire 1000 m », détaille Mélodie.

Pour autant, elle n’a pas abandonné les entraînements qu’elle faisait lorsqu’elle pratiquait le cross-country et les courses sur piste.

« Je pense que justement, sans être toujours sur la piste, faire des entraînements d’intervalles de vitesse c’est quelque chose qu’il est important de garder, dit la physiothérapeute. Si on fait juste 100 % de l’entraînement en trail, on ne va jamais être capable d’aller chercher de la vitesse. Je veux les garder pour continuer à avoir du speed en course. C’est aussi pour ça que je ne veux pas faire de longue distance pour l’instant. »

« Presque pas normal d’être stressée »

Mélodie Gilbert
Mélodie Gilbert a remporté au Gaspesia 100 son premier trail à vie – Photo : Gaspesia 100

Sans sa formation professionnelle, Mélodie pense qu’elle aurait pu facilement tomber dans le piège d’une transition trop rapide, contre productive. « Quand tu commences à faire quelque chose et que tu aimes vraiment ça, tu as envie d’en faire tout le temps. On a souvent tendance à vouloir aller en haut rapidement », analyse-t-elle.

Il y a aussi eu des changements sur le plan psychologique. Habituée au stress, à l’esprit de compétition et au chacun pour soi de coutume sur les cross et la piste, Mélodie a découvert une toute autre ambiance sur les compétitions de trail.

« En trail, c’est presque pas normal d’être stressée et d’être un peu trop compétitif, lance avec humour Mélodie. Pendant la course les gens s’entraident, s’encouragent et laissent passer quelqu’un qui veut les doubler, tandis qu’en cross-country, c’est limite si les filles se poussent pour ne pas te laisser passer. »

Elle a également constaté un regard différent sur les performances réalisées : « Tu fais ta course et tu ne te compares pas aux autres ni à un pace. En track, même au sein d’une équipe, il y a de la compétitivité, on compare nos entraînements. »


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Le matériel a beaucoup évolué pour Mélodie. D’une paire de chaussures de course toute lisse et ultra légère ou de pointes pour la piste et les cross, elle est passée à une paire d’espadrilles cramponnées et peu plus lourdes. Il a fallu investir dans d’autres équipements, comme un sac à dos adapté à la course. « Au début, j’avais un petit sac à dos qui shakait partout, avec une petite bouteille d’eau qui shakait aussi », se remémore la traileuse en riant.

Côté alimentaire, elle a également expérimenté. Partie  les premières fois avec des barres de céréales et des pâtes de fruit, elle s’est rendue compte, notamment en compétition, que ces ravitaillements étaient peu pratiques à consommer pendant l’effort. Depuis, elle a totalement adopté les gels et des aliments plus faciles à manger.

De nouveaux objectifs pour cette saison 2022

Mélodie Gilbert
La première partie de saison de Mélodie sera consacrée à sa préparation pour le marathon de Boston – Photo : Bouge Bouge

Mélodie Gilbert aborde cette deuxième saison avec de nouvelles ambitions. Son premier objectif sera sur route. La physiothérapeute participera en avril à l’emblématique marathon de Boston. Elle veut battre son record établi en août dernier (sans préparation) en 2 h 54 min et 44 sec. « J’ai un gros faible pour la trail, mais j’aime encore courir sur la route, se justifie la Québécoise.  En ce moment, je suis vraiment focus sur le marathon de Boston et, après avril, je vais repasser plus en trail. »

En course en sentier, la révélation de la saison 2021 tentera de confirmer sur les distances autour de 25 km, notamment au Gaspésia 100 et à l’Ultra-Trail des Chic-Chocs. Elle devrait « ajouter tranquillement » des 50 km à son plan de match. « Régionalement, la compétition se passe un peu plus sur les 50-60 km », juge-t-elle. Elle devrait être au départ du QMT 50 qui est l’une des cinq étapes du circuit national Golden Trail Series en Amérique du Nord. L’athlète sherbrookoise a dans l’idée d’aller se confronter au gratin mondial sur la version internationale du circuit promu par l’équipementier Salomon (au programme duquel on retrouve le Marathon du Mont-Blanc, Sierre-Zinal, Zegama ou encore Pike Peaks Ascent), mais ce ne devrait pas être avant 2023.

Enfin, Mélodie a des envies de voyager à l’extérieur du Québec. Tout n’est pas officialisé encore, mais elle devrait aller courir dans l’Ouest, du côté de la Colombie-Britannique et du Colorado.