Ultra-Trail Harricana du Canada : « la pure identité québécoise en terme d’environnement et de nature » 

Région de Charlevoix

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Le mont Morios, l'un des passages emblématiques du 125 km de l'Ultra-Trail Harricana du Canada - Photo : Ian Roberge / UTHC

Pour Dominic Arpin, l’Ultra Trail Harricana du Canada (UTHC) était une évidence. Pendant plusieurs mois, le journaliste de 53 ans a parcouru la planète pour tourner l’émission de TV « Les Crinqués », une série documentaire sur le dépassement de soi. Du Mexique à la Gaspésie, en passant par la Thaïlande, il a suivi des « furieux » de l’endurance, adeptes des courses extrêmes à pied ou en vélo, pour tenter de cerner leur « folie ». Dans le dernier épisode, le Québécois tenait à se mettre lui-même en scène, en « crinqué ». Il a choisi pour cela les sentiers de Charlevoix. « L’UTHC s’imposait, justifie Dominic Arpin. Pour moi, c’est la course de trail emblématique au Québec. J’aime sa philosophie, son slogan « je suis loup », ce sont des trucs qui me font vibrer. »  

Passionné de photographie, le journaliste loue la beauté des paysages et des panoramas façonnés il y a des millions d’années par le cratère d’une météorite, l’authenticité du Parc national des Hautes-Gorges-de-la-Rivière-Malbaie, « un des plus beaux parcs de la province ». Il aime se sentir à la fois si loin dans la forêt boréale et si proche du fleuve Saint-Laurent. « La lumière de Charlevoix adoucit tout, elle magnifie tout, décrit Dominic Arpin. Ce n’est pas pour rien que de célèbres peintres québécois se sont établis dans la région. » Il pense, entre autres, à Clarence Gagnon, l’un des artistes canadiens les plus renommés, tombé amoureux des villages et des décors locaux. 

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Lorsqu’il prend le départ du 65 km, le 10 septembre 2022, un épais brouillard enveloppe le parc des Hautes-Gorges. On se croirait dans un western, avec les falaises, les ponts de bois et les rivières qui n’apparaissent qu’au dernier moment, masqués par la brume. Ce père de deux enfants s’est préparé, inspiré et motivé par tous les « crinqués » qu’il a croisés sur sa route. Il n’en est pas non plus à son coup d’essai. Victime d’un cancer du rein en 2013, Dominic Arpin a vécu la maladie comme un détonateur vers un mode de vie plus sain, rythmé par le sport, les marathons, les trails ou encore les triathlons. 

Malgré son expérience, le journaliste a souffert sur les sentiers de l’UTHC, piégeux et rendus étouffants par des températures inhabituellement élevées. Mais il est allé jusqu’au bout de son aventure, jusqu’au mont Grand-Fonds, la station de ski de La Malbaie transformée pour l’occasion en zone d’arrivée de toutes les courses de l’événement. Outre son coach, qui l’accompagnait, c’est l’ambiance qui a aidé le coureur à tenir. « J’ai traversé de grands moments de doutes et de noirceurs, raconte Dominic Arpin. Mais à chaque ravitaillement, j’avais l’impression de tomber sur une petite oasis de bienveillance qui me redonnait la pêche. On sent que les bénévoles sont fiers de faire partie de cette équipe. »

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Au sommet de mont Morios – Photo : Ian Roberge / UTHC

Créé en 2011, l’UTHC fête cette année sa 12e édition. Le rendez-vous est incontournable pour la communauté du trail au Québec, dont les membres peuvent s’élancer sur une dizaine de distances, jusqu’au redoutable 125 km qui démarre au pied du mont du Lac à l’Empêche avant de sillonner la région. « Sauvage » et « reculé » sont les adjectifs les plus employés pour qualifier ce parcours. Un défi logistique pour les organisateurs. « Il n’est pas aisé d’acheminer toute la nourriture, le matériel voire même les coureurs sur ces territoires, témoigne Marline Côté, qui a été directrice générale des Événements Harricana pendant 7 ans. Là-bas, il y a peu de réseau cellulaire, on se sent loin de la civilisation, déconnecté, tel un animal libre dans la forêt. » Un loup. 

La course tire son nom du raid Harricana – « la grande voie » en dialecte algonquin -, un des rallyes de motoneige les plus difficiles au monde qui avait lieu dans les années 1990 dans le Grand Nord canadien. Impliqué bénévolement dans cette aventure, Sébastien Côté s’en inspire plus tard pour nommer le trail qu’il cofonde avec des amis, originellement pour soutenir l’un d’entre eux, Sébastien Boivin, atteint de la sclérose en plaques. Les fonds récoltés lors de l’évènement servent toujours à alimenter la recherche sur la maladie et, depuis, l’UTHC est devenu une institution dans la province, une sorte de fête de la course en sentiers le long du fleuve Saint-Laurent. 

Premier jalon du spectacle, l’ascension du mont des Morios, raide et technique, avec des passages de corde. Sur le 125 km, l’heure de départ est calculée pour que les coureurs parviennent au sommet au coucher du soleil. Certains prennent alors le temps de s’asseoir, de contempler les couleurs changeantes du ciel et cette vue à 360 degrés sur la chaîne des Laurentides. De là-haut, ils prennent conscience du chemin qui les attend pour rejoindre le mont Grand-Fonds, là-bas, au loin. Ensuite la nuit tombe, profonde, dense comme la végétation que les concurrents transpercent, ponctuée par les bruits des nombreux animaux.

Plus loin, aux alentours du refuge de la Chouette, le terme « reculé » prend tout son sens. « On dit aux coureurs qu’il est interdit d’abandonner ici sauf urgence majeure, précise Marline Côté. Dans cette zone, il est trop difficile d’évacuer des gens, d’autant plus cette année, avec la dégradation des chemins d’accès par des pluies torrentielles » Après une cinquantaine de kilomètres, les participants à la plus longue distance sont généralement déjà harassés par l’exigence de la « jungle » qu’ils traversent, à la fois roulante et accidentée, garnie d’obstacles qui obligent à être en permanence à l’affût d’où l’on pose ses pieds. Sur l’UTHC, les instants de répit se font rares. 

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Sur le parcours de l’Ultra-Trail Harricana du Canada – Photo : Ian Roberge / UTHC

Deuxième de l’UTMB 2022 derrière Kilian Jornet et étoile montante de la discipline, Mathieu Blanchard en sait quelque chose. C’est sur ces sentiers que le Franco-Canadien a découvert le trail en remportant, en 2016, presque par surprise, le 80 km. L’été précédent, il avait parcouru la région avec son père et son frère, venus lui rendre visite. Ils étaient partis en balade dans les gorges de la Malbaie, s’étaient arrêtés sur les bords de la rivière pour pêcher des truites et faire des barbecues. « Pour moi, cet endroit, c’est la pure identité québécoise en terme d’environnement et de nature, décrit l’ultra-traileur. Un tunnel de forêt tellement dense qu’on dirait qu’elle possède un plafond, l’humidité, la chaleur. Il ne faut pas être claustrophobe. »

À l’époque ingénieur français émigré à Montréal, Mathieu Blanchard se souvient aussi d’avoir été étonné par la présence de cloche à ours sur et dans les sacs des coureurs. « Je me suis dit ”ça veut dire qu’on va croiser des ours ? Je trouvais cela excitant, se rappelle-t-il. Les québécois sont habitués, ils savent depuis tout jeune que les ours ne sont pas dangereux, ils aiment juste ne pas être surpris. » Sur l’UTHC en particulier comme en général dans la forêt canadienne, la faune est reine. D’ailleurs, Marline Côté nous raconte en souriant que le parcours 2023 a dû être en partie modifié, le long de la rivière Malbaie, à cause des barrages de castors. « Si les coureurs sont chanceux, ils vont peut-être les voir », commente-t-elle. 

Sur la fin des parcours, l’UTHC reprend en partie les sentiers de la Traversée de Charlevoix, une trace célèbre, accomplie à pied par des randonneurs, en vélo aussi mais surtout en ski de fond, l’hiver. Marianne Hogan, l’une des meilleures ultra-traileuses canadiennes et internationales, l’a déjà parcourue en « fast packing » et en raquettes, en s’arrêtant dans les refuges. « Une belle section, avec de la super neige », se souvient-elle. Celle qui a terminé deuxième de l’UTMB 2022 a une histoire particulière avec cette course. En 2018, alors qu’elle doit s’aligner sur le 125 km, l’athlète se fracture le tibia et le péroné deux semaines avant le départ. Après deux opérations et une longue convalescence, elle revient trois ans plus tard, après avoir participé aux Jeux paralympiques de Tokyo en tant que guide pour une triathlète aveugle. Aux avant-postes pendant environ 80 kilomètres, Marianne Hogan se tord violemment la cheville, mais se refuse à abandonner. Elle marche et trottine le dernier marathon, et termine cinquième au classement général, deuxième femme derrière l’athlète de Colombie-Britannique Jenny Quilty. 

Tous plébiscitent l’ambiance particulière qui règne lors de cet évènement. Chaleureuse et communautaire. « L’organisation, les bénévoles et les coureurs y mettent vraiment du cœur, ce sont des passionnés, témoigne Mathieu Blanchard. Il y a quelque chose en plus qui vous électrise au cours de ces quelques jours, un état d’esprit familial, authentique, une atmosphère de fête que j’ai rarement vue ailleurs. » Le journaliste Dominic Arpin n’en pense pas moins : « c’est la quintessence même de tout ce que j’aime dans la communauté de la course en sentier au Québec. Les gens partagent les mêmes valeurs, s’encouragent, s’aident. Quand je viens chercher mon dossard, j’ai l’impression de faire partie d’une famille. » De faire partie d’un voyage en bande sur les sentiers de Charlevoix, qui ne fait que confirmer la réputation accueillante des Québécois. 

Le petit + Bonjour Québec
👉 Les coups de cœur des coureurs

Le sentier incontournable
Sans surprise, le sentier de l’Acropole des Draveurs fait l’unanimité. « Number one, imbattable », s’enflamme Mathieu Blanchard. « C’est une ascension sublime, renchérit Marline Côté. En haut, tu as une vue magnifique sur la vallée, c’est grandiose, la nature sauvage à perte de vue. »

Le panorama le plus incroyable
Outre le mont des Morios, là où les coureurs admirent le coucher de soleil pendant la course, Marline Côté vante la beauté du mont des Taillis, sur le territoire de Saint-Siméon, départ du 42 km de l’UTHC. « Un endroit méconnu ».

Le coin secret
Ce que Mathieu Blanchard adore faire, c’est longer la rivière Malbaie et prendre un chemin au hasard jusqu’à l’eau, découvrir des spots de pêche. Le Franco-Canadien confie aussi son enthousiasme pour les marées du fleuve Saint-Laurent, au niveau du village de La Malbaie : « Quand la marée est basse, tu peux aller marcher dans la baie. Le sol est un genre de sable argileux, trop bizarre, un peu comme des sables mouvants. Après la course, ça fait du bien pour régénérer les pieds. »

Le spot pour « chiller » après la course
Pour Marianne Hogan, aucun doute, il faut se rendre sur la plage de Saint-Irénée, le long du fleuve Saint-Laurent. « C’est super beau, décrit-elle. On peut aller y faire une balade à vélo pour récupérer, puis s’y poser. À chaque fois que je vais dans cette région, je veux aller faire un pique-nique sur cette plage. »

*Quelques liens Bonjour Québec pour explorer la région :

👉 Charlevoix
👉 Baie-Saint-Paul
👉 Québec
👉 Fleuve Saint-Laurent


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Québec Méga Trail : du Saint-Laurent au sommet du mont Sainte-Anne en passant par le fond du bois


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