L’organisateur de l’Ultra 01 (dans les montagnes du Jura), Alexandre Picquier, a annoncé fin mars-début avril le lancement d’un nouveau circuit de trail entièrement consacré aux épreuves de 100 miles (160 km). Plusieurs observateurs ont cru qu’il s’agissait d’un poisson d’avril, mais la « Ligue ULTRA » — c’est son nom — verra bien le jour en cette année 2024. Le concept, pensé par Alexandre Picquier, consiste à courir et à finir les quatre épreuves du calendrier en deux ans (la sienne l’Ultra 01, le Trail de Haute-Provence et deux courses mystères qui a priori n’existent pas encore au moment d’écrire ces lignes), toutes situées dans une même zone géographique, en l’occurrence le sud-est de la France, pour ensuite aller courir en novembre la « finale » sur l’île de Moorea près de Tahiti, en Polynésie française. Les athlètes qui monteront sur le podium de ces courses seront automatiquement qualifiés. Cent coureurs tirés au sort parmi les finisseurs des quatre épreuves gagneront également leur voyage pour un séjour avec dossard dans le Pacifique Sud. Toutes les courses devraient être retransmises sur une chaîne de télévision du groupe Canal+.
Le nouvel ultra-trail polynésien qui verra le jour sera avant tout un événement créé pour les coureurs de Moorea, Tahiti et la Polynésie.
Alexandre Picquier a répondu à quelques questions de Distances+.
Distances+ : Pourquoi lancer un nouveau circuit ? Quelle est votre motivation profonde ?
Alexandre Picquier : Face au développement des UTMB World Series, nous avions constaté sur notre événement une stagnation de la fréquentation de notre épreuve 100 miles tandis que toutes les autres affichaient une augmentation de 30 %. Force est de constater qu’avec la qualité de leur concept, les traileurs s’orientent plutôt vers les épreuves labellisées UTMB.
N’ayant pas souhaité intégrer ce circuit parce qu’il s’agissait principalement de formats propriétaires (le Groupe UTMB souhaitait initialement « acheter » les événements avant qu’ils intègrent le circuit développé en partenariat avec IronMan), plutôt que de critiquer et de subir, nous avons décidé de créer, nous aussi, un concept à forte identité afin de proposer une alternative.
Quelle est la philosophie et l’ADN de cette Ligue ULTRA ?
Elle propose aux traileurs une expérience incroyable : en courant et en finissant quatre ultra-trails dans le sud est de la France, on leur offre un package billet d’avion aller-retour Paris-Papeete et un dossard pour une finale paradisiaque.
Notre ambition est aussi de montrer que la France jouit d’une diversité de paysages exceptionnels. C’est pour cette raison que chaque manche aura une typologie singulière.
Comment vous situez-vous par rapport aux circuits d’ultras comme l’UTMB World Series et le World Trail Majors ? Et comment comptez-vous vous différencier ?
Tout d’abord, depuis le début, nous avons travaillé en collaboration avec les équipes UTMB, car LiveTrail (un logiciel de suivi de courses de longues distances étroitement lié à l’UTMB) sera le chronométreur officiel des épreuves de la Ligue ULTRA et va même nous fournir une interface dédiée et connectée pour l’espace coureur afin que chacun puisse savoir où il en est de la validation de son « passeport Ligue ULTRA ».
On se différencie tout simplement en proposant une autre alternative, laissant aux coureurs le choix de l’un ou l’autre tout en sachant pertinemment que les deux sont compatibles dans la durée.
Quel est l’ambition de cette ligue sur le long terme ?
Sur le long terme, l’idée, c’est de proposer des « qualifiers » (courses qualificatives) sur chaque continent en reprenant le même principe que ce que nous réalisons aujourd’hui : quatre courses de proximité permettant, une fois tous les deux ans, de partir à l’autre bout du monde. Nous en avons discuté avec Canal+ et nous sommes en phase là-dessus.
Pourquoi Moorea comme lieu de la finale, en sachant que l’événement Xterra Tahiti est déjà organisé là-bas (avec cinq trails de 12 à 100 km) ? [Précision post-interview : le 100 km n’existait pas lorsque le projet de 100 miles a été lancé]
Nous cherchions une île appartenant à la France, paradisiaque, et surtout sur laquelle il n’y a pas d’ultra. Le choix s’est très vite tourné vers Moorea et nous avons recruté sur place un directeur sportif local qui aura pour mission de valoriser le premier GR (sentier de grande randonnée) du Pacifique Sud, en cours de création, mais aussi d’assurer un relais, car notre volonté est de produire la quasi-totalité de l’événement avec des ressources locales. Nous y travaillons actuellement.
Comment appréhendez-vous les critiques des traileurs qui aspirent à participer à des ultras plus éco-responsables ?
Il y a deux façons de voir les choses. Bien sûr qu’on y a pensé et on peut mettre en avant tout un tas d’arguments vertueux, comme par exemple le fait que l’avion ne représente, entre guillemets, « que 2 % des émissions de carbone totales dans le monde ». Mais la vérité, c’est qu’on veut rendre accessible avec cette ligue quelque chose qui ne le serait pas en temps normal : « Je fais quatre ultras à côté de la maison et je peux partir à Tahiti vivre une aventure unique ! » Ceux qui ne seront pas en phase avec ce message auront tout à loisir de ne pas participer à la ligue
Pourquoi avoir fait cette annonce au milieu des poissons d’avril ?
Le timing a été dicté par la validation de Canal+ qui est un élément central de notre dispositif. Il a fallu annoncer rapidement ensuite pour que le Trail de Haute-Provence (organisé du 8 au 11 mai) puisse bénéficier de la lumière apportée par cette nouvelle ligue.
Dans quel coin de pays seront organisés les deux nouveaux événements qui seront au calendrier aux côtés de l’Ultra 01 (du 14 au 16 juin) et le Trail de Haute-Provence (du 8 au 11 mai) ?
Nous sommes en phase de finalisation avec les collectivités concernées, mais tout ce que je peux vous dire c’est que les quatre manches auront toutes lieu dans le sud-est de la France. Encore une fois, nous avons ciblé des territoires sur lesquels il n’y a pas d’ultras existants pour ne pas rentrer en conflit avec une orga historique, mais dont le nom à lui seul représente une marque au même titre que peut l’évoquer le Mont-Blanc ou l’île de La Réunion. Je le répète : attendez-vous à des surprises, car chaque course aura une typologie et une identité différente.
Il est question, dans le communiqué du 2 avril, d’une « émission » à propos de la ligue Ultra. À quoi faut-il s’attendre exactement ? Et quand et où sera-t-elle diffusée ?
Le contrat avec Canal+ est en cours de signature, nous n’avons donc pas encore le timing exact, mais il y aura principalement deux grosses nouveautés : une émission de lancement qui présentera le circuit et la finale en détail avec la mise en avant de notre parrain, et une émission sur « l’outdoor » qui sera diffusée sur Canal+ après chaque manche et qui reviendra sur les temps forts de la course avec des spécialistes en plateau, mais qui traitera de sujets plus vastes, également avec des invités et des athlètes.
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