Ce qu’il faut retenir du Festival des Templiers 2021

Ruth Croft
Ruth Croft a largement dominé le Grand Trail des Templiers et a remporté sa deuxième victoire sur cette course - Photo : Yohan Malliard

DISTANCES+ À MILLAU – Après deux années compliquées, le Festival des Templiers a tenu toutes ses promesses pour son retour au format traditionnel (en 2020 l’événement n’avait pas eu lieu à cause de la pandémie tandis qu’en 2019 les courses du dimanche avaient dû être annulées en raison des conditions météos). Ce rendez-vous historique du trail français a réveillé la ferveur que l’on avait un petit peu oubliée du côté de Millau. Le Britannique Jonathan Albon a dominé de la tête et des épaules le Grand Trail des Templiers (80 km, 3690 m D+). La Néo-Zélandaise Ruth Croft a quant à elle survolé la course féminine, remportant pour la deuxième fois en autant de participation la course reine. Comme c’est le cas chaque année sur cette manifestation populaire, les courses ont été ponctuées de surprises et d’anecdotes. Voici ce que Distances+ a retenu :

La saison XXL de Jonathan Albon, impérial sur la course 

Jonathan Albon
Au bout l’effort et de la douleur, Jonathan Albon a remporté le Grand Trail des Templiers – Photo : Yohan Malliard

Jonathan Albon réalise sans le moindre doute la meilleure saison de sa carrière. Vainqueur du Fjällmaraton (45 km, 1940 m D+) en Suède, de l’OCC (55 km, 3480 m D+) et du 42 km de l’Ultra Pirineu (2770 m D+) cette année, le Britannique était presque passé inaperçu dans la liste de départ en raison de son dossard élevé (il avait le 124 alors que tous les autres favoris étaient entre le 1 et le 20).

Or le champion du monde de trail en titre a survolé la course de bout en bout. Aux abords du 15e kilomètre, il a semé tous ceux qui l’accompagnaient et a rapidement pris une minute d’avance. « C’est le meilleur moyen de se cramer tout seul », lançait alors, dubitatif, Thibaut Baronian, qui suivait son co-équipier de l’équipe Salomon Sébastien Spehler sur différents points de ravitaillement.

Le Britannique a été revu par un petit groupe de cinq coureurs juste avant le passage à Saint-André-de-Vézines au km 34, mais tout de suite après, il s’est de nouveau isolé et n’a plus jamais été repris. On a pourtant cru un instant qu’il avait abandonné ou qu’il avait eu un problème en ne voyant pas sa puce biper à l’Arche de Roquesaltes alors que tous ses concurrents passaient un à un.

Mais c’est bien lui qui a franchi le premier la ligne d’arrivée sous les notes d’Ameno (la chanson diffusée à l’arrivée des trois premiers) en boitillant légèrement à cause d’une cheville droite douloureuse.

La déception de Sébastien Spehler

Le double tenant du titre de la course, Sébastien Spehler, n’avait pas caché son ambition d’être venu à Millau pour remporter une troisième victoire et se rapprocher du record de Thomas Lorblanchet (quatre succès sur l’épreuve). L’Alsacien, parti sereinement sur la première partie de course, a changé du tout au tout au passage à Notre-Dame de la Salvage (km 56). Alors que Thibaut Baronian informait son ami qu’il était en train de reprendre du temps à l’homme de tête, celui-ci lui répondu avec beaucoup de détermination : « je joue la victoire ou j’explose! »

Quelques instants plus tard, il est ressorti de ce ravitaillement survolté avec la ferme intention de passer la vitesse supérieure et de rentrer sur la tête de course. Mais il n’est jamais parvenu à reprendre du temps à Jonathan Albon. En fin de course, le Britannique a même creusé de nouveau l’écart pour le porter à près de 7 min à l’arrivée, contre 2 min 25 s à Mas de Bru (km 65).

« Franchement, je ne rentre pas avec mon plat à couscous, mais avec l’assiette à dessert et elle est très belle, a lancé Sébastien Spehler. Je n’ai rien à regretter. Je vois mon chrono, je vais aussi vite que la dernière fois, alors qu’il y a deux kilomètres de plus », a-t-il ajouté, entre fatalisme et amertume, après avoir franchi la ligne d’arrivée avec son chien, son fidèle partenaire d’entraînement. Il a aussi tenu à souligner le panache dont ont fait preuve Jonathan Albon, mais aussi Benoit Cori, qui a complété le podium, en prenant des risques pendant la course plutôt que d’attendre et de se regarder. 

Benoit Cori, toujours présent, a animé la course

Cela faisait deux ans, depuis sa participation à l’UMTB en 2019, que l’on n’avait plus vu Benoit Cori prendre part à une course majeure. Le double vainqueur des Templiers (2014 et 2015) a longtemps joué les premiers rôles et a tenté à plusieurs reprises de prendre seul la tête. Il a notamment réalisé un ravitaillement ultra-rapide à Saint-André-de-Vézines, alors que les coureurs étaient très nerveux, et en a profité pour prendre quelques mètres d’avance avec Jonathan Albon.

Il a ensuite longtemps lutté avec Nicolas Martin, trois fois deuxième de l’épreuve, pour décrocher cette dernière place sur le podium.

« Je suis complètement satisfait, a-t-il commenté sur la ligne d’arrivée. Je suis troisième, alors que je reviens de loin. J’étais aussi en forme qu’en 2014 et 2015, mais quand il y a des clients comme ça devant [c’est difficile d’aller les chercher]. »

Autre coureur qui a joué les trouble-fêtes et dynamisé une partie de la course, Sébastien Capus a créé la surprise durant la première moitié de l’épreuve. Sans solide référence (toute proportion gardée) par rapport aux coureurs qui l’entouraient, il a tenté de rester le plus longtemps possible dans le groupe des favoris, avant de terminer la course à son rythme et de prendre la 14e place.

« Je voulais voir quel était mon niveau en tenant le plus longtemps possible avec les meilleurs, a-t-il expliqué à son arrivée avec un genou ensanglanté, stigmate d’une chute survenue à 30 km de l’arrivée. J’ai tenu jusqu’au 40e, donc je suis plutôt content. » 

La domination de Ruth Croft

En l’absence de la tenante du titre Azara Garcia de los Salmones (elle devait participer à la course, mais elle s’est blessée la semaine dernière, NDLR), Ruth Croft faisait office de grande favorite et elle a tenu son rang. Partie prudemment (7e femme et assez loin de la tête de course sur les premiers pointages), elle a remonté ses adversaires progressivement et a pris les commandes à la mi-parcours.

Elle s’est imposée avec près de 20 minutes d’avance sur sa première poursuivante, l’Espagnole Gemma Arenas Alcazar. La Néo-zélandaise a également pris la 21e place au classement général et a remporté l’épreuve pour la deuxième fois de sa carrière.

Julie Roux a d’autres cordes à son arc

Podium féminin Templiers 2021
Pour sa première sur une aussi longue distance, Julie Roux a brillé en prenant la 3e place de l’épreuve – Photo : Yohan Malliard

Spécialiste des efforts beaucoup plus courts, Julie Roux avait fait le choix et le pari de s’aligner sur l’épreuve phare du Festival des Templiers.

« Pour moi les Templiers, c’était un peu mythique, a-t-elle justifié. J’avais vraiment envie de les faire depuis 2019 et ça faisait trois ans que j’attendais de pouvoir y participer. »

Une décision couronnée de succès puisque la Française a pris la troisième place de la course devant des coureuses bien plus expérimentées sur des longues distances à l’image de Maryline Nakache (6e) ou de l’ex-double championne du monde de trail Nathalie Mauclair (15e), qui participait à l’une des dernières courses de sa carrière.

« C’est vrai que c’est vachement différent, a reconnu Julie Roux. Quand je suis parti, on m’a dit “part doucement” et j’avais l’impression qu’on allait à 2 km/h, alors qu’en fait, à la fin de la course, j’étais pliée », a raconté la traileuse à Distances+. C’est difficile parce que je fais des courses jusqu’au format marathon et il y a toujours un moment où tu fournis vraiment un effort, alors que là c’est plus de la résistance. »

Elle a d’ailleurs failli faire encore mieux car elle est revenue en boulet de canon dans la dernière descente, reliant le sommet de la Pouncho à l’arrivée, sur Gemma Arenas Alcazar. Il ne lui a manqué qu’une petite minute et demie pour glaner une place de plus.

Cette performance ne devrait toutefois pas marquer une transition vers de longues distances. « Je pense que je vais rester plutôt sur des formats courts, mais je vais revenir aux Templiers de temps en temps, assure l’intéressée. Je ne vais pas rester sur une troisième place. » Le rendez-vous est pris et les ambitions sont affichées. 

Les abandons de Julien Rancon et Thomas Cardin

Ils faisaient partie des favoris et s’étaient tous les deux portés aux avant-postes en début de course, mais Thomas Cardin et Julien Rancon ont tous les deux choisis d’abandonner. 

Le premier, comme Distances+ l’avait indiqué avant la course, souffrait d’un hématome au genou consécutif à une chute de vélo subi il y a quelques jours. Il a décidé de s’arrêter après le ravitaillement de Saint-André-de-Vézines alors qu’il pointait en 12e position.

Son partenaire au sein de l’équipe Hoka est allé plus loin sur le parcours et a quitté la course après Mas de Bru, au kilomètre 65. Au moment d’écrire ces lignes, il n’avait pas encore donné d’explication au sujet de cet abandon.

À noter également que plusieurs grands favoris inscrits n’ont finalement pas pris le départ. Outre Azara Garcia, Andy Symonds, vainqueur de l’épreuve en 2011, et Ida Nilsson, 2e en 2017 étaient absents à Millau.

La consécration pour Vincent Viet sur l’Endurance Trail

Vincent Viet
Vincent Viet s’est offert un premier succès de prestige en remportant l’Endurance Trail – Photo : Festival des Templiers

Sur l’Endurance Trail (106 km, 4820 m D+), l’ex-Parisien Vincent Viet a remporté la course et a signé par la même occasion sa première victoire sur une grande course. Jusqu’à présent, il avait cumulé des places d’honneur, comme une 6e place sur le Grand Trail des Templiers en 2016 et une 5e place sur la CCC (101 km, 6140 m D+) la même année, ainsi que plusieurs 2e place comme au Restonica Trail (66 km, 3900 m D+) cette année ou à la Maxi-Race d’Annecy (82 km, 4970 m D+) en 2019, mais sans jamais réussir à gagner.

C’est à présent chose faite dans une course où il a mené de bout en bout et où il a résisté à la pression mise par le francilien Aurélien Collet, qui a pris la deuxième place. Vincent Viet, qui habite désormais à Annecy, a mis du temps à parcourir les derniers mètres, pour savourer et parce qu’il était submergé par l’émotion. 

« Ça fait longtemps que j’attends une belle victoire, a confié Vincent Viet juste après la course, encore ému aux larmes. J’ai fait pas mal de podiums et j’ai craqué sur pas mal de courses, alors celle-là, je la savoure. À 30 km de l’arrivée, quand je sors du ravito, Aurélien Collet rentre et là je me suis dit : “non, aujourd’hui, c’est pour moi!” »

Au passage, il est reparti avec un dossard pour la Western States 2022, que décrochent les vainqueurs de l’Endurance Trail en vertu d’un partenariat avec le Festival des Templiers.

Pascal Moreau a terminé ses 25e Templiers

Lui aussi est entré dans l’histoire du Festival des Templiers. En terminant le Grand Trail des Templiers après 12 h et 9 min d’efforts, Pascal Moreau est devenu dimanche le seul coureur à avoir terminé cette course lors de toutes les éditions de cet événement.

Le coureur de 58 ans a même eu le droit à une ovation avant le départ, dimanche à 5 h 15. Ce dernier a eu une pensée et un mot pour Christian Vignaud, l’autre coureur qui avait été présent à chaque rendez-vous avant cette année, embêté par « une foutue cochonnerie » et qu’il espère bien revoir au départ l’année prochaine.

Pascal Moreau aura encore l’occasion d’améliorer son total puisqu’avant la course il avait confié à Distances+ vouloir continuer, s’il le peut, jusqu’à ce que sa fille Marion participe aussi à la course reine. Elle s’est alignée cette année sur la VO2 Trail (19 km, 803 m D+) où elle a terminé en tout juste 3 h.

La ferveur de Millau

Enfin, on a surtout retrouvé une ambiance qui avait disparu des rues de Millau depuis deux ans. Le public, peut-être un petit peu moins nombreux à l’arrivée des courses du Festival des Templiers que les dernières années, s’est déplacé en nombre sur l’ensemble des parcours pour donner cette ambiance extraordinaire et faire honneur à sa réputation d’événement populaire.

Cette édition a aussi permis de renouer avec l’hymne de cet événement, la chanson Ameno du groupe Era, qui a bien dû être diffusée une centaine de fois en l’espace de trois jours. Dernière tradition avec laquelle tous les participants, bénévoles et spectateurs ont pu se réaccoutumer : le discours de Gilles Bertrand avant le départ du Grand Trail des Templiers.

Cette année, le fondateur a bien évidemment évoqué les péripéties de la dernière édition organisée, la seule fois où il a fallu annuler une des courses des Templiers, et la situation sanitaire. Mais il a surtout fait parler son cœur et ses tripes, comme il en a l’habitude, pour donner le frisson à tous les participants avant de s’élancer pour 80 km. 


Résultats Grand Trail des Templiers 2021 : 

Top 10 masculin : 

  1. Jonathan Albon (RU) 6 h 32 
  2. Sébastien Spehler (FR) 6 h 39
  3. Benoit Cori (FR) 6 h 44
  4. Nicolas Martin (FR) 6 h 49
  5. Petter Engdahl (SWE) 7 h 03
  6. Kevin Vermeulen (FR) 7 h 10
  7. Robbie Simpson (RU) 7 h 12
  8. Romain Maillard (FR) 7 h 22
  9. Benedikt Hoffmann (ALL) 7 h 23 
  10. Henri Ansio (FIN) 7 h 24

Top 10 féminin : 

  1. Ruth Croft (NZ) 7 h 51
  2. Gemma Arenas Alcazar (ES) 8 h 10
  3. Julie Roux (FR) 8 h 12
  4. Fiona Porte (FR) 8 h 27
  5. Esther Eustache (FR) 8 h 34
  6. Maryline Nakache (FR) 8 h 45
  7. Megan Mackenzie (AFS) 8 h 51
  8. Laure Paradan (FR) 9 h 08
  9. Charlotte Dauchot (FR) 9 h 15
  10. Elodie Davy (FR) 9 h 32 

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