Il est presque certain qu’au moins une personne va se fouler une cheville ou s’égratigner sérieusement pendant une compétition de course à laquelle participent plusieurs centaines de coureurs. Comment les organisations gèrent-elles le volet santé et sécurité de leur événement? Distances+ a rencontré le directeur médical du Québec Méga Trail et de l’Ultra-Trail Harricana, Steeve Parent, qui est prêt pour un nouveau week-end d’intervention en pleine nature.
Pompier professionnel de métier, patrouilleur de ski et vétéran de l’armée, ce père de famille a mis en place une équipe de professionnels du secteur médical afin de subvenir aux besoins des coureurs. Leur mission : intervenir rapidement, avec efficacité, face à toutes situations et imprévus pour que le plus de coureurs possible finissent leur course.
Cette équipe homogène est composée de paramédics et de spécialistes qui travaillent en milieux hospitaliers ainsi que de patrouilleurs de ski. Steeve s’occupe également de la formation, dans laquelle il porte particulièrement attention au « taping », aux « EpiPen », et à la mesure du taux de glycémie.
« Ce sont des professionnels de la santé qui peuvent rester debout pendant 30 à 40 heures sans arrêt », explique Steeve. On sait que ça n’existe pas ailleurs, une équipe médicale qui va courir un événement complet et qui est au courant de ce que les coureurs traversent et comment ils se sentent. C’est un immense atout. »
Il va sans dire que l’intervention de l’équipe médicale n’est pas le seul aspect à prendre en compte dans une stratégie globale de santé/sécurité, indique Marline Côté directrice générale de l’Ultra-Trail Harricana, mais c’en est un gros morceau.
« Il y a aussi d’autres volets à considérer, comme la prévention, la sensibilisation et l’information, de même que la gestion des barrières horaires, la coordination avec les acteurs locaux et la direction de course. »
Prêts à intervenir en tout temps
Sur le terrain, l’équipe médicale a pour mission d’être rapide. « On a un ˝time frame˝ pour réagir, on n’a pas de délais. En cas de problème on essaie d’être là en quelques minutes », explique Steeve Parent.
L’équipe médicale se sépare en quatre groupes qui font des rotations de tâches. En tout temps, elles se chevauchent pour que tous les tronçons soient surveillés. Il y a également des bénévoles qui se promènent en quatre roues pour les aider.
L’équipe de Steeve arrive sur les lieux bien équipée. Elle a des camions munis d’un défibrillateur, de planches dorsales, de paniers d’évacuation, des bonbonnes d’oxygène, de glucomètres, tensiomètres, stéthoscopes ainsi que de solutés.
Chaque coureur-paramédic a également dans son sac à dos de 8 à 10 livres d’équipement médical ainsi que de l’eau, en plus de leur équipement personnel. Pendant un événement, il parcourent entre 50 et 60 km dans les sentiers.
Tous les moyens sont bons
L’équipe est formée pour savoir faire la différence entre une situation critique qui nécessite une intervention médicale, ou une situation où le moral est bas et les pensées sont négatives.
« Le but principal de notre équipe médicale est que les gens vivent une belle expérience, qu’ils finissent leur course en bonne santé et qu’ils aient le goût de revenir. On aide les gens à prendre les bonnes décisions quand ça ne va pas bien, tant sur le plan physique que sur le plan psychologique », explique Steeve.
« Tout dépend du constat, des signes vitaux, de l’état et de l’expérience du coureur. On a à décider des soins et, au besoin, d’une évacuation sécuritaire afin de prodiguer les traitements. Une fois que tout est beau du côté physique, on va travailler du côté psychologique », ajoute-t-il.
Quand la nuit tombe
À la tombée de la nuit, alors que de nombreux coureurs sont encore dans les sentiers, l’équipe de Steeve se retrouve pour discuter de la stratégie nocturne.
« On patrouille les sentiers. À cette étape, on veut tout faire pour motiver notre monde pour terminer notre course. C’est critique. On fait des feux, on donne du liquide chaud et on remonte le moral ».
Le plus gros défi dans tout événement, « c’est de ˝dealer˝ avec tous les imprévus sans que ça paraisse », dit Steeve. Par exemple, en juin, lors du Québec Méga Trail, il est resté pris dans la boue avec son camion pendant près de trois heures.
« Les appels rentrent sur la radio, mais tu es pris dans la boue et il ne faut pas que ça paraisse », dit-il.
C’est avec l’aide d’une pelle, de bons citoyens et de bénévoles en quatre roues qu’il va se déprendre, mais la course, elle ne s’arrête pas.
« Tout le monde est débordé, donc tu te débrouilles et la machine continue. C’est l’envers du décor. Mais on a les bons éléments aux bons endroits et on réussit à donner un bon produit. »