Le difficile chemin vers des courses écologiques

Photo : Ultra-Trail Harricana

SEPTEMBRE 2016 – Quelques courses en sentier québécoises ont entamé un virage vert depuis 2016. Le Québec Méga Trail (QMT), l’Ultra-Trail-Harricana (UTHC) et le Bromont Ultra ont réduit leur utilisation de verres jetables aux tables de ravitaillement, l’une des principales sources de gaspillage lors des événements de course. Le QMT s’est aussi lancé dans le compostage des aliments, particulièrement des fruits non consommés. Le Bromont Ultra a mis au point une gestion des déchets et a utilisé de la vaisselle compostable afin de limiter son impact écologique. Sommes-nous devant une tendance qui prendra de l’ampleur avec le temps? Ça reste à voir.

« Les communications marketing des courses en sentier mettent de l’avant la nature et sa beauté, dit Hubert Fortin, mais on dirait que lors des courses elles-mêmes, on ne s’en préoccupe pas vraiment. » Le jeune athlète est l’un de ceux qui a donné l’impulsion aux récentes initiatives vertes du QMT et de l’UTHC. Il a lancé son projet écolo lors d’un stage de sensibilisation à la gestion des matières résiduelles, l’été dernier, à la MRC de la Côte-de-Beaupré.

Hubert, étudiant au cégep en sciences de la nature, est de ceux qui s’attendent à ce que les courses en sentier diminuent leur empreinte écologique au cours des prochaines années. « Les coureurs de sentier sont ouverts à ces changements, probablement davantage que les coureurs sur route, puisque nous profitons de l’environnement chaque fois que nous courons en forêt », déclare-t-il.

Il souligne que les initiatives réalisées au QMT et à l’UTHC ont reçu des commentaires majoritairement positifs de la part des participants. « Ça me paraît évident que nous devons tâcher d’être plus cohérents pour que les valeurs véhiculées par la course en sentier se reflètent dans les habitudes des coureurs et des organisations auxquelles ils participent », dit Hubert.

Pas si facile que ça

Mais le défi du virage vert est plus complexe qu’il n’y paraît, souligne Christian Morneau, directeur des opérations chez Horizon 5, une entreprise qui organise des événements de course en sentier dans la grande région de Québec.

Les coureurs ont été habitués à recevoir un certain niveau de services et ont de nombreuses attentes lorsqu’ils participent à des événements, explique Christian. « Il y a beaucoup, beaucoup de sensibilisation à faire auprès des coureurs. Si on ne donne pas un t-shirt, des médailles, des puces intégrées au dossard et des objets promotionnels, on reçoit inévitablement des plaintes de la part des gens », dit-il. Christian sait de quoi il parle : il a déjà tenté plusieurs projets écoresponsables par le passé.

Par exemple, il dit répondre, chaque année, aux reproches de plusieurs coureurs. Il doit leur expliquer pourquoi il préfère offrir des médailles en chocolat, confectionnées par une chocolaterie locale, plutôt que de donner des médailles produites en Chine, dispendieuses et souvent inutilisées après la course du Trail de la nuit polaire, qu’il organise.

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La médaille en chocolat offerte aux participants du Trail de la nuit polaire – Photo : courtoisie

Il indique par ailleurs que, malgré tout, de nombreux verres jetables ont été utilisés à l’été 2016 aux tables de ravitaillement lors du QMT, où il travaillait. Les coureurs n’avaient pas bien compris l’information selon laquelle ils devaient être autonomes quant à leur récipient d’eau. Certains étaient carrément réticents au changement.

« Effectuer des modifications de la sorte dans notre offre de services demande énormément de communication auprès des coureurs pour qu’ils comprennent bien à quoi s’attendre et comment se préparer. Juste le fait de sensibiliser les gens à jeter leurs déchets dans le bon bac [recyclage/poubelle] est un défi! » En effet, événement après événement, Christian trouve un tas de bouteilles d’eau vides dans la poubelle et de la nourriture dans le bac de recyclage.

Des changements qui concernent toute la communauté

Christian croit qu’il faudra un mouvement plus généralisé, engageant plusieurs événements de course, pour que les participants s’habituent et adaptent leurs attentes. C’est loin d’être acquis, selon lui.

« Les organisateurs demandent en très forte majorité des puces intégrées au dossard plutôt que des puces réutilisables à velcro parce qu’elles sont beaucoup plus simples de gestion, malgré qu’elles soient un peu plus dispendieuses », explique celui qui offre les services de chronométrage Sportstats un peu partout au Québec.

« Nos partenaires et nos fournisseurs ont eux-mêmes des attentes et des exigences, en préférant, par exemple, que nous offrions des sacs remplis de publicités aux coureurs et un tas d’objets promotionnels plutôt que de miser sur des communications électroniques ou directes avec les coureurs. »

Bref, c’est toute la communauté de gens participant à l’organisation d’une course qui doit être sensibilisée et engagée dans le nouveau paradigme qui se met graduellement en place si on veut que les effets escomptés se fassent réellement sentir, croit le gestionnaire d’événements.

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