Sarah Verguet Moniz : la saison du gros D+

Sarah Verguet Moniz et sa casquette jaune fluo, qu'elle porte sur chaque course - Photo courtoisie
Sarah Verguet Moniz et sa casquette jaune fluo, qu’elle porte sur chaque course – Photo : courtoisie

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C’est loin du Québec et de son tapis roulant que l’athlète féminine Distances+ 2018 s’exprimera cette année. Après un passage en Auvergne à la fin du printemps, Sarah Verguet Moniz s’installera tout l’été dans les Alpes françaises pour s’entraîner et participer à plusieurs courses en sentier où le dénivelé est particulièrement élevé, avant de revenir finir sa saison dans la Belle Province.

En août dernier, la jeune femme de 31 ans quittait l’Abitibi pour Sherbrooke où elle a commencé des études de physiothérapie, après avoir travaillé plusieurs années comme entraîneuse privée dans une salle de sport. Élève studieuse dans l’âme, du genre qui « aime avoir de bonnes notes », elle veut se consacrer à 100 % à ses trois années de cégep. Elle a donc planifié sa saison de courses en conséquence pour tout mener à bien, en concentrant ses compétitions essentiellement sur la période estivale.

La championne franco-portugaise a presque tout gagné en 2018 (125 km de l’Ultra-Trail Harricana du Canada, 100 km du Québec Méga Trail et 80 km du The North Face Endurance Challenge de New York, en plus de terminer quatrième du 105 km de l’Ultra-Tour du Beaufortain, en France). Elle a souvent déploré ne pas être assez forte dans les montées et les descentes. Alors cette année, elle a décidé de travailler cette faiblesse en prévoyant environ 20 000 m de D+ lors des courses organisées auxquelles elle prendra part.

« C’est beau le Québec, mais il n’y a pas de vraies montagnes. J’ai besoin de vivre dans de vraies montagnes », confie Sarah, qui sera accueillie plusieurs semaines chez sa tante, en Haute-Savoie, au coeur des grosses montagnes françaises.

Sarah et le tapis grimpant

« Mon D+, pour le moment, je le fais sur le tapis », dit-elle, même si cet hiver, il y a de « l’amélioration, car je vais courir une fois par semaine dehors, contrairement à l’hiver dernier. Je souffre du syndrome de Raynaud (NDLR: un trouble de la circulation sanguine qui entraîne entre autres des engourdissements aux extrémités des doigts), alors je dois faire attention. Je me suis acheté des gants-mitaines de course et ça va, mais en dessous de -10 degrés je ne vais pas dehors. »

Le tapis demeure donc pour l’instant son fidèle partenaire d’entraînement.

« Moi, j’aime ça le tapis, assure-t-elle en souriant. J’arrive à en faire facilement pendant deux heures. J’écoute de la musique, je m’évade, je n’ai pas à regarder où je mets les pieds, je pense à mes courses, je fais de la visualisation. Et puis ça paraît niaiseux, mais des fois j’étudie même dans ma tête. Dans les sentiers, je suis beaucoup plus focus… »

La saison dernière, Sarah a parfois couru jusqu’à 3 h 30 sur son tapis. « Ça m’a paru long, mais j’ai de la volonté, et la volonté fait tout, avec un peu de génétique. La course, c’est 80 % de mental. Quand tu as eu une grosse journée, tu vas t’entraîner quand même. C’est comme ça qu’on réussit dans la vie », affirme cette gagnante.

Que ce soit sur tapis, sur asphalte ou sur sentier, 2018 restera pour Sarah la première année où elle s’est vraiment entraînée sérieusement pour la course. Elle a couru 4000 km. 

« Cette année, je vais garder le même style d’entraînement, assure-t-elle. Je bâtis mon plan en laissant une grande place au feeling. Je ne fais pas d’intervalles parce que je n’aime pas courir vite, par contre, comme j’appréhende le D+ et que j’aime le fartlek, je vais faire du fractionné en montée pour bien progresser. »

VVX et Montagn’Hard

Sarah Verguet Moniz a remporté le 125 km de l'Ultra-Trail Harricana 2018 - Photo : UTHC
Sarah Verguet Moniz a remporté le 125 km de l’Ultra-Trail Harricana 2018 – Photo : UTHC

La première course et le premier gros objectif de Sarah Verguet Moniz se déroulera le 31 mai dans le superbe cadre des volcans d’Auvergne. Elle sera parmi les élites au départ du 110 km (3500 m D+) du Festival VVX (Volvic Volcanic Experience) à travers la chaîne des Puys. L’événement est parrainé par Kilian Jornet, qui devait courir l’an dernier, avant de se blesser lors de la Pierra Menta d’hiver. Il ne serait pas surprenant qu’il soit sur la ligne de départ cette année.

« Je mise beaucoup sur cette course à Volvic, dit-elle. Actuellement, c’est à elle que je pense pour le D+. Je veux faire un résultat là-bas », assume Sarah, qui participera deux semaines plus tard au Trail des Crêtes du Chablais, une course de 53 km (3820 m D+) près de chez sa tante. « Là, j’irai en mode entraînement, parce que ce n’est pas une distance que je connais, c’est plus rapide que ce à quoi je suis habituée. Je verrai comment je me sens, mais je n’exclus pas de faire le 84 km (6290 m D+). »

Puis, viendra le deuxième objectif de la saison, mais aussi le plus gros, puisque Sarah s’attaquera à l’affolante Montagn’Hard une course de 108 km et 8050 m de D+, soit près de 75 m de D+ par kilomètre, autour du Mont Joly avec de splendides vues sur le Mont-Blanc.

« L’objectif, c’est de gagner, affirme-t-elle. Faire le mieux que je peux. Après, ça dépend de qui est là, d’autant que la course donne maintenant des points ITRA cette année », cinq au total, ce qui attire les coureurs qui cherchent à se qualifier à l’une des courses de l’UTMB.

Elle espère avoir l’occasion, en foulant les sentiers alpins, de se confronter aux élites européennes souvent à l’aise sur ces terrains-là. « Courir avec des gros noms, ça me motive, reconnaît-elle. J’aimerais ça participer à une course avec des vraiment top pour savoir à quel niveau je me situe. Je pense ceci dit que j’en suis loin et que j’ai des croûtes à manger. »

Enfin, le 11 août, Sarah s’alignera sur sa dernière compétition savoyarde, le Trail des Hauts Forts entre les stations d’Avoriaz et de Morzine, soit 51 km pour 3900 m de dénivelé.

À noter qu’en dépit de ses résultats exceptionnels et de sa future exposition internationale, Sarah Verguet Moniz court sans aucun commanditaire.

« Je ne suis pas très forte pour me mettre en avant sur les réseaux sociaux, et je suis sans doute un peu trop dans ma bulle, c’est mon point faible et je pense que ça me nuit en tant qu’athlète, tente-t-elle d’expliquer. En tout cas, personne ne m’approche », déplore-t-elle.

La Chute du Diable et Bromont Ultra

À son retour au Québec, elle envisage de courir, fin août, le 82 km de la Chute du Diable (2350 m D+), dont elle a entendu beaucoup de bien. « Ce n’est pas très technique, ça me convient, a commenté Sarah, qui se rendra à Saint-Mathieu-du-Parc, en Mauricie, pour gagner.

Sarah Verguet Moniz ne cherchera donc pas à défendre son titre à l’Harricana. « J’aime faire des compétitions, mais pas forcément les répéter. Je la coche et je passe à autre chose. Je suis retournée à Harricana en 2018 parce que j’avais été invitée pour la première fois de ma vie », explique-t-elle.

La championne se laissera peut-être également tenter par le Bromont Ultra à l’automne, où elle n’a pas encore mis les pieds.

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