Photo : Tor des Géants
Distances+ s’est entretenu vendredi avec le coureur en sentier québécois Éric Breton, juste avant qu’il ne s’écroule dans son lit après avoir affronté et vaincu le Tor des Géants. Il s’agit d’un raid 330 km et de 24 000 m de D+ dans les Alpes italiennes de la Vallée d’Aoste. Éric a terminé sa course en 104 heures, entre l’extase de courir avec les meilleurs et l’extrême douleur causée par trois tendinites.
« C’est toute une course! », lâche Éric à l’autre bout du fil. Sa voix dynamique et enthousiaste ne laisse rien transparaître de l’intensité de l’épreuve qu’il vient de surmonter.
« Je suis cerné, amaigri, j’ai les pieds enflés, j’ai des ampoules, et mis à part mes tendinites, je me sens bien, même si je me déplace très lentement. »
Le coureur, qui a eu la chance d’être sélectionné pour être l’un des 800 partants de cette course terriblement exigeante, s’est offert une douce folie : « ça me tentait de courir avec l’élite, raconte-t-il. Alors je suis parti avec eux. Et j’ai tenu! Après 50 km, j’étais en deuxième position. »
« Je savais que je ne courais pas à ma place, mais je voulais “m’essayer”, reconnaît-il. J’en ai profité. Je regardais leur technique de course, leur façon d’utiliser les bâtons pour se propulser. J’ai eu beaucoup de plaisir, c’était stimulant. Et puis ça m’amusait d’entendre “il y a un Canadien parmi l’élite” », a-t-il ajouté, avant de souligner qu’il avait quand même fini par être rattrapé par la réalité.
« J’ai souffert d’une gastrite. Ça m’a ralenti un peu et j’ai commencé à ressentir de la fatigue, a expliqué Éric Breton. Je me suis ramassé 149e. »
Formidable performance
Oui, mais le Tor des Géants, c’est long, et même s’il déplore une série de mauvais choix, comme de s’arrêter dormir dans un refuge non chauffé, ce qui lui a plombé le moral, il s’est repris et n’a cessé de remonter au classement jusqu’à l’arrivée. Il a passé la ligne en 31e position, une formidable performance.
« Je suis chirurgien-dentiste, je suis père de trois jeunes enfants. Je ne suis pas un coureur professionnel. Je m’entraîne au mont Sainte-Anne, qui culmine à 800 m d’altitude [et il n’a pas pu s’entraîner comme il le voulait en raison d’une blessure qui l’a handicapé jusqu’en mai], alors arriver 31e, au milieu des meilleurs au monde et de coureurs locaux qui s’entraînent ici, qui sont habitués à l’altitude, j’en suis vraiment content. »
Sa réussite, Éric Breton la doit selon lui à son mental, qui est venu compenser ses lacunes d’entraînement, affirme-t-il. « J’ai été capable d’endurer la douleur de trois tendinites (deux aux genoux et une à la cheville) et de parcourir les dix derniers kilomètres malgré des douleurs épouvantables. »
Les ultratraileurs n’ont pas été épargnés par la météo. Il a notamment plu les deux derniers jours. « On a même eu de la neige, s’étonne encore Éric Breton. On a dû utiliser les crampons. À 1 900 m d’altitude, dans la nuit de jeudi à vendredi, c’était l’hiver. D’une manière générale, il faut être prêt psychologiquement à subir de grosses différences de température, selon que l’on traverse un village à 1 200 m d’altitude ou un col à plus de 3 000 m au milieu de la nuit. »
« J’ai aimé le Tor des Géants, mais c’était vraiment, VRAIMENT, difficile. Je suis très fier de l’avoir fait », a conclu Éric, qui retiendra les « paysages complètement fabuleux et les villages pittoresques », ainsi que « les portions excessivement techniques qu’il faut franchir à maximum 3 km/h ».
Et maintenant, dodo!
Top 3 du Tor des Géants 2016 :
- Oliviero Bosatelli (Italie) : 75 h 10
- Oscar Perez Lopez (Espagne) : 81 h 14
- Pablo Criado Toca (Espagne) : 83 h 40