Baptiste Cartieaux, ultra-polyvalent, est l’un des grands espoirs de l’athlétisme français

7e et 1er européen des championnats du monde de course en montagne en junior

Baptiste Cartieaux
Baptiste Cartieaux a débuté la course en montagne dans le grand bain lors des mondiaux en Thaïlande - Photo : courtoisie

Spécialiste de la piste et du cross, l’athlète junior Baptiste Cartieaux a fait une incursion fracassante cette année dans la course en montagne. Il a d’abord remporté la course de sélection pour les mondiaux à Saint-Jacques-les-Blas, dans le Cantal, puis il a pris la 7e place des championnats du monde en Thaïlande (épreuve classique « montée-descente »). Il a terminé troisième Européen, et donc meilleur Français, derrière le quatuor ougandais qui a raflé la mise. Pour sa première dans la discipline, le junior est reparti avec le statut de vice-champion du monde par équipe.

Baptiste Cartieaux affiche également un haut niveau de performance dans ses compétitions de prédilections. À seulement 19 ans, il a d’ailleurs déjà un beau palmarès.

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Sur 3000 m steeple, en catégorie junior, il a été deux fois finaliste des championnats du monde d’athlétisme et a terminé au pied du podium des championnats d’Europe. Il est le deuxième meilleur performeur français de tous les temps sur cette épreuve.

Dans les labours, il a accroché la médaille de bronze au printemps 2022, avant de brillamment décrocher sa sélection il y a quelques semaines pour les championnats d’Europe de cross qui auront lieu ce dimanche 12 décembre à Turin.

Sur route, il est vice-champion de France en titre dans la catégorie junior sur 10 km avec un record personnel à 30 min 01 s.

Même en duathlon il est parvenu à s’adjuger le titre national junior en 2021. Le Cergy-Pontains profite des jeunes catégories pour multiplier les expériences, mais l’espoir d’une participation aux Jeux olympiques 2024 à Paris est déjà bien ancré dans sa tête.

En parallèle de son projet sportif, le coureur est aussi youtubeur depuis quatre ans sous le pseudo Syblo, relativement populaire dans le milieu de l’athlétisme. Sa chaîne YouTube, qu’il co-anime avec Lucas Vivin, lui permet de revenir sur ses courses ou ses entraînements. Il a la volonté de « démocratiser » son sport.

Distances+ s’est entretenu avec cet athlète polyvalent qui semble transformer en or tout ce qu’il entreprend.

Baptiste Cartieaux
Baptiste Cartieaux a débuté la course en montagne en septembre 2022 lors de la course qualificative aux mondiaux en Thaïlande – Photo : courtoisie

Distances+ : En septembre, tu as décidé de te lancer dans la course en montagne. Qu’est-ce qui a motivé ce choix?

Baptiste Cartieaux : Je mentirais si je disais que le lieu des championnats du monde, en Thaïlande, n’a pas joué. Mais il y avait surtout le défi de me lancer dans une discipline où je n’avais pas du tout fait mes preuves. Je faisais seulement des côtes le dimanche matin pour préparer les cross, mais ce ne sont pas du tout les mêmes qu’en course en montagne. Sur la course de sélection, on avait 450 m D+ pour 6,8 km. Pour m’adapter, j’ai intégré pendant trois semaines quatre séances de spécifique, avec l’objectif de décrocher une sélection en équipe de France. Ça a aussi abouti à une super vidéo sur ma chaîne YouTube.  

Tu termines 7e de ce championnat du monde, cela ouvre des perspectives…

Je ne pense pas. Il y a un problème de calendrier qui n’est pas compatible avec le steeple. Cette année, le championnat du monde avait lieu en novembre, mais c’est exceptionnel. En temps normal, il se tient au mois de juin ou de juillet (les prochains mondiaux se dérouleront début juin 2023 à Innsbruck, en Autriche) en plein milieu de la saison de piste. Si un jour il est de nouveau organisé en novembre, je retenterai ma chance avec plaisir.

Le championnat du monde de course en montagne je ne pourrai, a priori, y participer qu’une seule fois dans ma vie, et c’était cette année en junior. En course en montagne, il y a la catégorie U20 et ensuite on passe directement en senior, alors que sur piste et en cross, il y a les U23 qui servent d’intermédiaire. C’était un peu l’occasion où jamais. Sinon, sur les coups des 40 ans, pourquoi pas se mettre au trail long, même si c’est encore autre chose.

Tu le reconnais toi-même, en étant grand et charpenté avec une musculature prononcée, tu n’as pas nécessairement le gabarit pour ce type de course. Tu es naturellement plus à l’aise sur les parcours roulants. Comment as-tu géré ce « désavantage »?

Je pense que c’est vraiment grâce à ma caisse et à mon aspect physiologique. L’expérience que je commence à avoir m’a aussi permis de mieux gérer. Mais ça n’était vraiment pas évident.

Tu es allé jusqu’en Thaïlande pour participer à ce championnat. Voyager régulièrement pour participer à des compétitions fait débat, à tel point que des athlètes de renom comme les ultra-traileurs Xavier Thévenard et Andy Symonds ont fait le choix de se restreindre sur les épreuves auxquelles ils participent. Quel regard portes-tu sur cet enjeu ?

Je respecte les choix de ces athlètes. Mais si tu veux participer à un championnat du monde, tu es obligé de prendre l’avion. Je ne suis pas pour qu’on se restreigne totalement, mais c’est sûr qu’il y a des vols facilement évitables. Typiquement, pour Turin (où ont lieu les championnats d’Europe de cross, NDLR), on aurait pu y aller en train. Il faut aussi regarder le prix. L’aller-retour coûte 45 € en avion contre près de 200 € en train.

Baptiste Cartieaux
Baptiste Cartieaux a terminé 7e des championnats du monde de course en montagne 2022 en Thaïlande, catégorie junior – Photo : courtoisie

Qu’est-ce que cette expérience t’a apportée pour les autres disciplines que tu pratiques plus couramment? 

J’ai fait pas mal de côtes pendant ma préparation donc j’ai bien progressé dans ce domaine. Je pense aussi avoir gagné en puissance et en résistance. Mentalement, la course en montagne, c’est très très dur. Il faut savoir relancer après s’être tapé plus de dix minutes de montée. Musculairement, j’ai beaucoup été sollicité, mais c’est aussi ça qui m’a fait gagner en puissance pour la suite de la saison et m’a fait apprendre à me dépasser davantage.

Tu as couru ton premier cross de la saison cinq jours plus tard, avec de grosses douleurs aux ischio-jambiers, dans la perspective de t’aligner sur le cross de sélection aux championnats d’Europe qui arrivaient dans la foulée. N’y avait-il pas un problème de calendrier? 

C’est sûr que c’était un projet ambitieux. Trop? Je ne pense pas. Et puis j’aime ce que je fais. Ça fait dix ans que je fais de la course à pied donc je commence à avoir une certaine expérience. Je n’ai pas été blessé depuis deux ou trois ans. En junior, tu ne participes pas encore aux gros rendez-vous comme les JO. Le temps viendra pour vraiment se préparer à LA course ou LA saison.

À s’éparpiller sur autant de disciplines, tu ne crains pas de perdre en performance?

C’est sûr que si tu veux être vraiment fort, il faut se spécialiser sur une épreuve. Je pars du principe que je ne suis qu’en junior et qu’il y avait une sélection un peu facile à prendre. C’était quelque chose à vivre une fois dans ma vie. La montagne et le cross se ressemblent un peu, il y a juste des côtes plus longues. Pour le moment, je kiffe, et quand il le faudra, je me spécialiserai vraiment.

Pourquoi cette sélection était-elle « facile »? 

La course en montagne est un sport de niche. Ceux qui la pratiquent font généralement du ski l’hiver. Les deux se ressemblent parce qu’il y a de la côte, mais, mine de rien, ce n’est pas la même intensité. C’est une sélection qui était un peu plus simple à aller chercher, notamment en raison d’une densité moins importante que sur le cross ou la piste. Le fait que je ne sois pas un spécialiste et que j’aie tout même réussi le montre bien.

Ton entraîneur Philippe Favreau doit parfois s’arracher les cheveux pour composer tes plans d’entraînements…

Il en apprend tous les jours grâce à moi (rires). Plus sérieusement, il découvre avec moi. On essaye d’adapter les plans d’entraînement comme on peut. En Thaïlande, on avait la chance d’arriver dix jours avant la course donc j’ai pu m’entraîner avec des spécialistes de la discipline. Mais Philippe se met à la page et il regarde comment on s’entraîne pour tel ou tel effort en fonction des courses sur lesquelles je m’aligne.

Tu continues d’animer ta chaîne YouTube. Avec l’ampleur des événements auxquels tu participes, comment s’intègrent tes vidéos dans ton quotidien?

Je travaille avec Lucas Vivin pour arriver à alimenter cette chaîne. Il faut juste s’adapter pour trouver le temps de tourner ces vidéos puis de les monter. Certains préfèrent jouer à la console, nous on préfère créer des vidéos. Certes, ça fait qu’on a peu de temps libre, mais c’est ce qui nous plaît.

Qu’est-ce que cette chaîne t’apporte ?

À l’origine, je voulais démocratiser l’athlé. J’ai d’ailleurs lancé une deuxième chaîne avec les mêmes vidéos que sur ma chaîne principale juste traduites en anglais. L’idée, c’est de toucher un public encore plus large. Ça me permet aussi de développer mon image. Sans cette chaîne YouTube, je ne suis pas sûr que j’aurais pu avoir un équipementier et encore moins être sponsorisé. Ça me fait rentrer dans un autre échelon d’aide, qui est bien plus important. Proposer aux marques un bon niveau, c’est bien, mais la visibilité que je peux offrir en plus est un vrai atout. J’espère que ça me permettra de vivre de ce sport plus tard et que je pourrai abandonner le projet, très incertain, de devenir prof d’EPS.

Justement, tu suis en parallèle des études de STAPS (Sciences et techniques des activités physiques et sportives, NDLR). Comment s’intègrent-elles dans ton programme déjà très chargé?

Je mets toujours l’athlé en premier, les vidéos ensuite. Les études font un peu partie des miettes, je ne cherche pas à être le premier de ma promotion. Je me contente du minimum et de valider les années parce que ça reste important malgré tout. Je suis un peu perdu sur ce plan-là en ce moment. Je suis un cursus d’éducation motricité pour devenir prof d’EPS étant donné que j’ai mes copains qui font ça et qui m’aident beaucoup. Je suis parti dans cette direction, mais ça peut encore changer l’année prochaine.

Autre sujet, les chaussures de course à pied nouvelles générations. Elles font polémiques. Toi, tu les as adoptées relativement tôt, pourquoi?

C’est un passage un peu obligatoire. Aujourd’hui, ne pas avoir ces chaussures revient à te tirer une balle dans le pied. On voit bien maintenant que tout le monde en utilise, à l’entraînement comme en compétition. Et les marques aussi conçoivent majoritairement des modèles avec des plaques carbone. Finalement, tout le monde à changer sa manière de s’équiper et tout le monde les a adoptées.

Quels sont tes objectifs pour la saison 2022/2023 ?

Le gros gros objectif sera les championnats d’Europe d’athlétisme en espoir, l’été prochain. Ça sera compliqué parce que je passe Espoir 1 et certains athlètes ont deux ans de plus que moi. En admettant que tout le monde fasse la même saison que l’année dernière, je devrais avoir ma place. Mais c’est seulement sur le papier. Le championnat d’Europe de cross fait aussi partie des objectifs. Sur ce genre de course, il y a tellement de rebondissements que je vais juste essayer de tout donner. Une place dans les 20 premiers est envisageable, même si je connais mal le niveau de mes adversaires.


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