En août dernier, à la ligne du départ de l’Ultratour des 4 Massifs (UT4M), dans la région de Grenoble, Annie Jean, éternellement modeste, s’est placée assez loin dans le groupe. L’athlète québécoise prenait le départ du 170 km couru en quatre étapes, soit environ un marathon par jour, et ne savait pas du tout à quoi s’attendre. Elle l’a remporté.
« J’aime ce format. J’aime beaucoup la distance marathon en montagne. Tu cours 45 à 50 km par jour, alors tu peux te pousser et te donner. Le truc, par contre, c’est de bien récupérer pour recommencer le lendemain », dit-elle.
Il y avait aussi l’option d’effectuer le même parcours de 170 km avec 11 000 m de D+ en solo. « Je ne sais pas ce qui est plus difficile, dit Annie. Notre départ était entre 7 h et 8 h le matin. On a le temps de s’ankyloser et il faut repartir. Ça pose un risque de blessure. »
Blessée au troisième jour
C’est d’ailleurs une blessure subie lors d’une chute le troisième jour, sur une descente très abrupte, qui lui a causé des difficultés. « C’est difficile de s’entraîner pour ce genre de dénivelé au Québec. J’ai couru le dernier jour, mais j’ai aggravé mon cas. Je pensais que c’était juste raide, mais c’était plus sérieux ».
Malgré sa blessure, il n’était pas question pour elle de ne pas tout donner. Et pour cause! Elle risquait sa première place!
En effet, dès la première journée, Annie Jean arrive première, ayant droit au maillot rose. Elle sera première également le deuxième jour. Elle creuse alors une avance qu’elle maintiendra tout au long des quatre jours de compétition.
« J’ai commencé mollo, mais je n’arrêtais pas de dépasser. Je me suis retrouvée première, avec Simone Schwarz en deuxième, dans les 15 premiers sur le classement général. Simone a été la première fille recrutée pour faire l’Académie Salomon de cette année, comme moi j’ai fait l’année passée à Moab. Nous avons beaucoup jasé, nous avons beaucoup de choses en commun, et sommes devenues de bonnes amies. Nous avons couru ensemble la troisième journée. »
La 4e étape, une vraie épreuve
C’est avec de l’émotion dans la voix qu’Annie Jean parle de la dernière journée de compétition.
« J’ai eu tellement mal! J’hésitais à prendre le départ. J’avais de la misère à me diagnostiquer moi-même. J’ai poussé comme jamais avant, j’ai tout donné. Vers la fin, j’avais de la misère à marcher. Mais j’étais tellement émue de l’avoir terminé et d’avoir pu garder mon lead, j’en pleurais d’émotion. Mon chum m’attendait quelques kilomètres avant la fin pour prendre des photos et m’accompagner. Il ne m’avait jamais vue aussi émotive pendant une course. J’étais tellement fatiguée! »
Résultat : elle termine première femme avec un temps cumulé de 23 h 54 : 49, et 17e au classement général, 36 minutes devant la deuxième femme. En plus d’avoir gagné meilleure grimpeuse chaque jour.
À ce sujet, elle rit en disant que c’est drôle de voir la petite Québécoise grimper sur les sentiers européens, malgré le fait que nous n’avons pas ici de gros dénivelés.
Traitement inégal entre hommes et femmes
Annie Jean rit cependant un peu moins lorsqu’elle mentionne qu’il a fallu une intervention de plusieurs personnes pour que l’on donne le même traitement aux femmes qu’aux hommes lors des podiums.
Chaque jour, on annonçait les meilleurs grimpeurs et sprinteurs, ainsi que le leader. Tout se faisait au masculin, sans mention de la meilleure sprinteuse et grimpeuse. « On en était bouche bée. En trail, ici c’est beaucoup plus équilibré. »
Ce qui ne l’empêche pas de recommander la course à tout le monde. Surtout pour les ravitos, équipés des meilleurs fromages et de la meilleure charcuterie qu’elle ait goûtés.
Et maintenant? Beaucoup de repos pour se remettre de sa blessure, et rien de concret en termes de compétition.
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