Déprimé, anxieux? La course à pied, un médicament à prendre!

La chronique du Doc Benoit

simon benoit
Photo : courtoisie

Il faut se rendre à l’évidence, nous vivons dans une société stressante. Nous connaissons tous, de proche ou de loin, des gens qui sont touchés par la maladie mentale. Contre la dépression ou les troubles anxieux, un bon docteur pourrait-il prescrire de la course à pied?

La plupart des gens disent qu’ils se sentent mieux après une période d’activité physique vigoureuse. Ils se sentent « énergisés ». Est-ce que ces observations perdurent dans le temps? Les études pointent vers des bénéfices durables qui dépasseraient largement les symptômes dépressifs.

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Un nombre convaincant d’études démontre en effet que les individus qui pratiquent une activité physique régulière rapportent moins souvent des états dépressifs ou anxieux. Le  regroupement d’experts Cochrane a révisé, en 2013, 37 articles scientifiques et en a conclu que l’activité physique a un impact positif significatif sur les symptômes dépressifs. Une méta-analyse de 2010 a également démontré que l’activité physique réduit les symptômes anxieux chez les personnes atteintes de maladies chroniques.

Quels types d’activités physiques sont à favoriser?

Les données scientifiques ne permettent pas d’émettre des recommandations claires concernant un type ou une durée d’entraînement pour obtenir des résultats supérieurs. L’impact sur l’humeur semble toutefois directement relié à l’intensité et la fréquence des sessions d’activités physiques.

Les trois théories du bien-être par le sport

Si les sportifs ressentent directement les effets de leur activité sur leurs humeurs, encore reste-t-il aux scientifiques à comprendre ce qui se passe réellement dans l’organisme.

La théorie hormonale

Une première hypothèse porte le nom de « théorie hormonale ». L’activité physique augmenterait dans le cerveau la production de substances appelées monoamines et bêta-endorphines. Ces petites bêtes ont un impact positif sur l’humeur, car elles stimulent les centres de la récompense et du plaisir.

La théorie du mieux-être

Les personnes atteintes de dépression ou de troubles anxieux semblent plus fréquemment déconditionnées physiquement. Elles affichent un palmarès nettement plus marqué de mauvaises habitudes de vie, que ce soit au niveau de l’alimentation, du tabac, de l’alcool, des drogues ou de leur sédentarité. Cela contribue à amplifier leur état de détresse. Elles présentent un « état de fatigue » qui rend l’activation difficile. Chaque obstacle est insurmontable!

L’activité physique procure une meilleure capacité aérobique ainsi qu’une force musculaire bonifiée. C’est un grand pas dans la bonne direction. Une meilleure forme physique peut contribuer à casser le cercle vicieux de la détresse psychologique en haussant le niveau d’énergie.

La théorie de la croissance nerveuse

La course à pied, comme toute autre activité physique, amplifie l’expression de récepteurs spécifiques – nommés galanines – situés dans une région du cerveau appelée le « Locus coeruleus ». Ceci provoque une suppression de l’état de tension causé par le stress. Les médications dites « anti-dépressives » utilisent le même mécanisme. Une étude de 2012 publiée dans Neuroscience & Neuro Biobehavioral Reviews effectuée sur des rats est venue renforcer le bien-fondé de cette hypothèse.

Les états dépressifs seraient notamment dus à une diminution de la production de neurones dans une région du cerveau appelée hippocampe, plus précisément au Gyrus denté. Des études, effectuées encore une fois sur des rats, ont démontré que l’activité physique augmentait de deux à trois fois la production de neurones dans cette région. Ce phénomène est expliqué par l’augmentation de la production de sérotonine et de bêta-endorphines qui sont deux facteurs de croissance de l’hippocampe.

Il est intéressant de noter qu’une hausse similaire est notée à la suite de la prise de médicaments antidépresseurs et que le délai de réponse clinique habituel, de quatre à six semaines, correspond au temps de croissance des neurones de l’hippocampe. Une revue publiée en 2006 dans le Journal of Psychiatry & Neuroscience a confirmé ces observations.

La prévention, toujours la meilleure pilule

Selon les conclusions du rapport Panorama de la santé 2013 publié par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les Canadiens sont de grands consommateurs de médicaments antidépresseurs, avec une dépense de l’ordre de 1,4 milliard de dollars par année.

Le Canada arrive au 4ème rang du palmarès mondial des plus grands pays consommateurs de psychotropes. Ces chiffres soulèvent évidemment plusieurs questions. Utilisons-nous trop rapidement l’approche pharmacologique comme solution à la gestion du stress?

Une chose est certaine, les coûts reliés à l’activité physique sont minimes lorsqu’on tient compte de ses bénéfices clairs et démontrés hors de tout doute. Les bienfaits dépassent largement l’impact sur les symptômes anxio-dépressifs.

Il semble irresponsable à tout point de vue de ne pas exploiter toutes les tribunes pour promouvoir avec ardeur les saines habitudes de vie et l’activité physique sous toutes ses formes.

Le traitement des troubles anxieux passe par une approche multi-facettes qui inclut une meilleure connaissance de soi, de ses intérêts et de ses stratégies de gestion de stress. Dans l’arsenal thérapeutique disponible en 2017, l’activité physique a une place de choix en première instance à titre préventif ainsi qu’en traitement de première ligne pour les troubles anxio-dépressifs.

Il vaut mieux s’activer pour voir loin. Soyons responsables de notre bonheur,  soyons inspirants pour notre entourage, soyons actifs, heureux, vivants et contagieux.


Simon Benoit est médecin de soins critiques en urgence, en plus de tenir une pratique de bureau axée sur la médecine sportive. Il est membre de l’Association québécoise des médecins du sport. Il est également diplômé en physiothérapie et en chiropratique et est ambassadeur de La Clinique du Coureur.

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