La lente et brute exploration de soi en Islande

Au printemps dernier, notre collaboratrice Caroline Côté a fait un séjour d’une semaine en Islande. Elle en a ramené des photos empreintes d’une sensibilité extraordinaire, ainsi que ce récit très intime et touchant.

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Ocre, terre brûlée, ambre, vert Véronèse, vert de chrome… voilà l’amalgame des seules couleurs que j’ai croisées le long de ma route sur cette île de glace qui se trouve sur la dorsale médio-atlantique. Velkominn á Íslandi. Bienvenue en Islande.

Comme la majorité des jeunes femmes dans la mi-vingtaine à la recherche de fausses aventures à « instagramer » et de lieux de style « Pinterest » à visiter, je me « garroche » sur les billets d’avion au prix de 300 $ offerts par Wow Air. Après les burnouts, les peines d’amour à enterrer et la surdose de sulfites contenus dans le vin blanc lors des 5 à 7, la destination islandaise résonne bien dans la tête des milléniaux.

Reykjavik est une métropole parfaite pour débuter une expédition. Lors de mon arrivée dans son attrayant centre-ville, les petits cafés qui ornent les ruelles pavées par-ci par-là sont tous uniques. L’arôme du grain de café moulu m’appelle à l’intérieur du bistro Stofan situé à la bordure de la ville.

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Deux américano plus tard, je me suis fait une idée de l’itinéraire des cinq prochains jours. Un trajet qui me permettra d’aller à la rencontre de ma solitude et de prendre le temps d’arrêter.

Je suis accompagnée de Mia Sarrazin. Elle est à la tête de Cœur intelligent, un organisme situé à Montréal qui a comme mission de rendre le monde plus vert. Elle a le même objectif que moi : prendre le temps.

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Je me plais à conduire ici, peut-être tout simplement parce que j’aime admirer et observer les paysages et m’émerveiller devant des petits riens. D’un tournant à l’autre, la route nous mène entre les montagnes à des endroits cachés, merveilleux.

J’aime arrêter aux stations d’essence aux noms complexes pour découvrir des produits alimentaires qui n’existent pas au Québec. Au lieu des bonbons, c’est la morue séchée – l’harðfiskur – qui est en vogue. Sans trop m’inquiéter pour la route que j’emprunte – parce qu’il n’y en a qu’une – on se dirige vers la ville d’Akureyri au nord de l’île.

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L’air est froid. Ça sent la mer et les algues. Des arrêts s’imposent à quelques endroits, comme à la chute de Goðafoss, l’une des plus célèbres du pays. Le paysage est semblable à celui du Territoire du Nord dans Game of Thrones. On s’attend à croiser Jon Snow un peu partout. Ce ne serait pas une mauvaise chose de tomber sur lui. Malheureusement, ce n’est pas le cas. Ce sont des touristes armés de Nikon qui arrivent en masse sur le site.

Sans arbres ni végétation dense, l’atmosphère de ce coin de pays est reposante. On n’a pas tellement envie d’entrer en contact avec les visiteurs de la région. On passe rapidement au charmant café-bar Ölstofa Akureyrar. Arrivées dans un repère pour la nuit, les édredons nous enveloppent jusqu’à l’aurore, où l’on reprend la route tranquillement.

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Terre d’immensité, avec l’horizon à perte de vue, le terrain est parfait pour la course de tous les styles. Les routes précédées de la lettre F ne sont généralement pas goudronnées et traversent le pays. C’est avec difficulté que je me retiens d’enfiler mes chaussures préférées pour effectuer un parcours de 10 à 20 km dans la région.

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C’est le territoire des chevaux laissés en liberté aux quatre vents. Celui qui balaie leurs flancs et leur crinière avec constance. Cela les rend plus fort, un peu comme il rend aussi les Islandais plus humbles et plus solides qu’ailleurs dans le monde, peut-être.

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Une chute secrète attire notre attention. Nous nous y rendons lors d’une journée remplie de soleil. Il y a quelques kilomètres de marche à faire pour se rendre à destination. C’est un souffle humide qui arrive à mon visage dès que je me rends tout près de l’eau. Je me sens vivante, je me sens connectée à l’environnement sauvage et brut duquel, parfois, on s’éloigne lorsqu’on passe ses journées en ville. Mes cheveux collent à mon visage, la lentille de ma caméra s’embue de particules d’eau, mais je ne ressens pas le besoin de m’en éloigner. Au contraire, j’ai plutôt envie de respirer à fond et d’attendre les yeux fermés.

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Je dois rentrer à Montréal. Juste avant le départ, c’est le hameau de Vík í Mýrdal qui m’appelle. En chemin, on arrête à Seljavallalaug. Il s’agit d’une piscine construite à flanc de montagne dans une vallée étroite et perdue en pleine nature. Bâti en 1923, le bassin est alimenté par de l’eau de source chaude qui coule le long de la calotte glaciaire Eyjafjallajökull.

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À Vík, c’est la roche et le sable noir qui me fascinent. Je suis confrontée à moi-même et je dois résister à l’appel d’aller poser mes pieds nus sur la plage. Je manque de temps et je dois retourner dans le 4×4 avant le début de la soirée. C’est le dernier couché de soleil que je verrai dans ce magnifique territoire qui me fait vibrer encore aujourd’hui.

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Quelque part dans mon ventre, l’envie d’aller courir sur le lichen avec les visons et les renards polaires m’emmène quelque part très loin de mon ordinateur et de mon bureau du centre-ville.

Après des jours de regards vers le ciel à la recherche d’aurores boréales entre les nuages, le ciel me fait un cadeau lors de la dernière nuit sur place. De retour à Reykjavik, tout près du Harpa, la salle de concert magnifique, le ciel s’illumine. Je me demande combien de personnes ont la chance d’en observer dans leur vie. Pour ma part, j’en ressens une force nouvelle, une énergie brute et tranquille qui fait maintenant partie de moi.

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