Suzanne Lefrançois Couturier : 31 h 47 de course, des hallucinations, mais « que du plaisir »

Suzanne Lefrançois Couturier
Suzanne Lefrançois Couturier sur le Marathon du Mont-Blanc - Photo : Marathon du Mont-Blanc
Suzanne Lefrançois Couturier sur le parcours du Marathon du Mont-Blanc en 2015 – Photo : Marathon du Mont-Blanc

Suzanne Lefrançois Couturier ne savait pas en découvrant l’existence de la course en sentier il y a quelques années que cette discipline allait lui changer la vie. Après avoir rencontré l’homme de sa vie sur le parcours de l’Ultra-Trail Harricana en 2015, elle a éprouvé, le weekend dernier, l’extrême fierté de passer la ligne d’arrivée de la très technique course TDS (119 km, 7 250 m de dénivelé) organisée dans le cadre de l’Ultra-Trail du Mont-Blanc. Sa motivation à poursuivre sur sa lancée est maintenant décuplée.

À l’été 2015, la coureuse de La Malbaie avait eu un coup de cœur pour les Alpes en prenant le départ du Marathon du Mont-Blanc. Elle était repartie de ce voyage avec la ferme intention d’un jour courir l’Ultra-Trail du Mont-Blanc.

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« J’ai choisi de courir la TDS dès cette année, parce que j’avais les points nécessaires et que la terminer me permettait d’en cumuler assez pour m’inscrire à l’Ultra-Trail du Mont-Blanc l’année prochaine », explique-t-elle.

Un choix qui s’est avéré payant, puisque Suzanne a passé la ligne d’arrivée de l’une des plus longues courses de sa vie en 31 h 47, soit 13 minutes de moins que l’objectif qu’elle s’était fixé.

Ce n’était pas gagné d’avance, parce qu’elle avait été contrainte de réduire énormément sa charge d’entraînement au cours de la dernière année en raison d’une inflammation de la bandelette iliotibiale (syndrome de l’essuie-glace). « Personne au Québec n’a réussi à réduire mes douleurs, se désole-t-elle. C’est finalement en avril que j’ai rencontré un kinésiologue français qui m’a aidée à guérir et à reprendre confiance en mes capacités. »

Récit d’une course haletante

Quand on lui demande de nous raconter sa course, Suzanne est hyper enthousiaste. « J’ai adoré, assure celle qui vit désormais près de Lyon avec son copain français. Je me rends compte de ce que je viens d’accomplir. C’est une sensation étrange. Je suis à la fois tellement fière et triste. Ça marque la fin d’une étape, la réalisation d’un grand rêve. J’ai d’autres rêves en tête, mais celui-là, c’est un gros morceau! »

« Le départ à Courmayeur (Italie) était spécial; je n’avais jamais vécu un départ avec autant de monde, confie-t-elle. On a marché pendant plusieurs minutes avant de pouvoir trottiner un peu, puis dès la première montée ça a été une succession de bouchons. Des montées en file indienne pendant près de trois heures. C’était bien beau, mais j’avais peur de manquer de temps! »

« Finalement, dans la première descente, j’avais plus d’espace et je me sentais bien malgré la température qui montait rapidement. Ça a commencé à être plus difficile vers Bourg-Saint-Maurice (km 51). Au ravito, je n’avais personne pour m’aider, c’était plein de monde et j’avais de la difficulté à m’alimenter et à réfléchir. J’en avais oublié que je courais en France. Je me pensais sur une course au Québec. »

« Heureusement, je me connais et j’avais déjà vu des amis dans cet état. J’ai fait un gros effort pour manger et me réhydrater avant de repartir pour la montée de 1 600 m vers le Passeur Pralognan, avec la température qui atteignait 37 degrés. Ç’a été long et pénible, je faisais tout en mon possible pour rester hydratée et manger un peu. »

« Quand la nuit est tombée, c’était beaucoup mieux, j’avançais bien et c’était magique de voir toutes les lumières des lampes frontales. Je me suis endormie un petit cinq minutes en voulant prendre une pause pour manger sur une roche et j’ai repris la route. J’ai profité de la nuit pour essayer d’aller plus vite, car je savais que la deuxième journée serait aussi chaude que la première. »

« Lentement, mais sûrement, après 24 heures de course, j’avançais toujours. Mes échauffements sous les pieds étaient embêtants, mais je savais que ce n’était rien de grave. J’ai finalement passé la ligne avec la plus grande joie. »

« J’avais toujours entendu parler des gens qui ont des hallucinations après plusieurs heures de course, dit Suzanne. J’ai vu mes premiers supporteurs fantômes après 25 heures de course. Ils étaient bien sympathiques! Ça m’a bien fait rire, je savais que ce n’était pas réel, mais je les voyais vraiment! »

Suzanne se souviendra probablement longtemps de la chaleur accablante à laquelle tous les coureurs ont dû faire face cette année. « Survivre à 37 degrés en plein soleil pendant quatre heures de montée », c’est ce qu’elle a trouvé le plus difficile.

Dans ces moments, et dans tous les autres où le découragement avait tendance à prendre le dessus, elle s’est répété mille fois : « c’est juste de la course, t’es encore capable de mettre un pied devant l’autre, donc tu continues. »

Si tout va bien, Suzanne s’élancera en 2017 de Chamonix pour affronter l’emblématique Ultra-Trail du Mont-Blanc, où elle ira chercher, comme cette année, « avant tout du plaisir ».